D’emblée, la série des «Murs de Sao Luis» jette le trouble : ces tirages grand format à partir de détails de murs prennent l’allure de toiles abstraites. Le grain obtenu par l’agrandissement confère à la photographie une matière picturale qu’accentue la présence de tâches de peinture. Sur la pierre, marquée par le temps et les traces, se dessinent des personnages, des continents, des fleuves imaginés, pouvant évoquer une terre vue du ciel… Bien que différentes, ces photographies ne sont pas sans rappeler la série «Poésie urbaine», sur les murs de Madrid, exposée en 2001 à la galerie Claude Samuel, et sur laquelle il revient notamment dans une vidéo.
Le trouble demeure lorsque le visiteur découvre la série intitulée «Bahia de todos los Cristos», réalisée dans des églises et des musées d’art sacré de Salvador de Bahia. Autrefois conçus par des esclaves, des Christs en cire, écorchés vifs, semblent faits de chair et de sang. Le regard allumé d’une ferveur inouïe, ils exhibent une douleur paroxystique, caractéristique d’une esthétique chrétienne outrancière flirtant avec le sado-masochisme.
De la série en noir et blanc des «Portraits au miroir», au nombre de trois dont un autoportrait, émane de nouveau l’idée de voyage. D’un moi à un autre, la traversée, de l’autre côté d’un miroir vieilli, piqué, évoque un voyage dans le temps. Le reflet, flou, ne permet pas l’identification d’un être (sauf dans le cas de l’autoportrait, encore net lui) qui, au lieu de se révéler, semble progressivement disparaître, comme si la mort gagnait du terrain.
Visible aussi dans l’espace de la galerie, la série «Impressions de voyage», trois tirages noir et blanc pleins de rêverie.
François Fontaine
— De profondis. Série de photographies.