Gregory Giquel, Daniel Dewar, Maya Andersson, Joseph Bartscherer, Lilian Bourgeat, Martin Boyce, Benjamin Brecknell Turner, Fanny David, Rodney Graham, Laurent Le Deunff, Benoît Maire, Eric Poitevin, Daniel Schlier, Bruno Serralongue, Nathalie Talec
Dans la forêt
Dans la nuit du 23 au 24 janvier 2009, la région Aquitaine a subi des vents très violents qui ont ravagé une partie de la forêt en mettant à terre 42 millions de mètres cubes de bois. Un an quasiment jour pour jour après cette tempête, prénommée Klaus, le Frac Aquitaine présente un ensemble d’œuvres liées au monde de la forêt.
Chacune décline à sa manière un axe propre: le paysage, le cycle des saisons, la chasse, le braconnage, le refuge, l’industrie du bois, l’espace du conte… Cette exposition réunit une sélection des nouvelles acquisitions du Frac (Laurent Le Deunff, Gregory Giquel et Daniel Dewar, Eric Poitevin, Daniel Schlier), complétées par des prêts (Maya Andersson, Josef Bartscherer, Martin Boyce, Rodney Graham, Benoît Maire, Bruno Serralongue, Nathalie Talec) et deux nouvelles productions : Lilian Bourgeat et Fanny David.
La forêt est posée par la récurrence d’un élément qui l’identifie immédiatement en signant sa «verticalité» : l’arbre, ou un ensemble d’arbres, qui joue comme une métonymie, la forêt se caractérisant par la densité de sa végétation. Photographies, installation et film rendent compte des multiples facettes de cette emprise sylvestre, depuis une époque reculée jusqu’à nos jours : l’exemple le plus ancien, dans le cadre de cette exposition, est l’épreuve signée Benjamin Brecknell Turner qui montre, en négatif, un arbre solitaire sous les voûtes de Crystal Palace à Londres en 1851, dont l’échelle par rapport à l’architecture lui donne des allures de bonzaï.
Fait écho à cette image celle de Dan Graham qui isole un arbre centenaire et majestueux en inversant sa frondaison. De l’arbre, on passe à la forêt : l’installation de Martin Boyce constituée d’arbres «en néon» compose un espace boisé à la fois synthétique et abstrait, proche de l’immatériel. Plus loin, La Châsse, film de Benoît Maire explore une forêt futuriste peuplée d’arbres identiques, agencés dans un alignement répétitif sur un plateau dépouillé, à l’image d’un labyrinthe. Où se trouve la forêt comme il est d’usage de se la représenter ? Sans doute du côté de la grille photographique de Joseph Bartscherer qui, dans une visée documentaire et objective, reconstitue le décor d’une forêt sous forme d’un «puzzle» incomplet et au fil des saisons, dans sa luxuriance comme dans son habit hivernal.
L’exposition présente également les «hôtes de ces bois» : un renard aux oreilles dressées se détache d’une clairière à une heure que l’ont dit «entre chien et loup» (Maya Andersson), la photographie monumentale de Eric Poitevin représente, dans la longue tradition des natures mortes, le cadavre d’un gibier pendu par les pattes. Derrière l’animal, c’est aussi la forêt comme terrain de chasse qui est évoquée. Lieu de culte, elle est aussi un refuge pour les hommes, marginaux ou immigrants, un espace hors-la-loi cerné par Bruno Serralongue dans l’enceinte de la «jungle de Calais», protectrice pour les uns, impénétrable pour les autres.
Par-delà les menaces qui pèsent sur nos existences (illustrées par Daniel Schlier en s’appuyant sur la tradition congolaise de l’Inakalé), la forêt ouvre également au merveilleux des Contes et Légendes. Aussi, rien d’étonnant à rencontrer une paire de bottes géantes (Lilian Bourgeat), une tête de cerf sur un corps de femme (Nathalie Talec), ou encore Carl Cox, célèbre DJ assoupi sur un talus après une nuit d’ivresse, sculpté en terre glaise par Daniel Dewar & Gregory Giquel.
Ainsi, l’exposition Dans la forêt invite le visiteur à se plonger au coeur d’un espace complexe, ouvrant autant de chemins et sentiers à emprunter et découvrir pour s’y perdre et s’y retrouver, rêver, réfléchir.