Communiqué de presse
Wilfrid Almendra
Cuts Across the Land
Pour «Cuts Across the Land», sa première exposition personnelle en galerie, Wilfrid Almendra présente un ensemble de nouvelles sculptures qui dessinent un paysage mental peuplé de formes singulières, hybridations d’images de la culture populaire et de motifs inspirés de la nature. Retranchées derrière leur singularité, ces créations résistent à la description, ou plutôt rendent celle-ci forcément subjective. Comme un test de Rorschach en trois dimensions, les décrire relève inévitablement de l’interprétation.
Pour les composer, Wilfrid Almendra puise dans un ensemble d’images, en partie glanées sur internet, des éléments qu’il assemble et hybride en dessin, avant de s’atteler à la fabrication de chaque sculpture dans son atelier. Utilisant une vaste palette de matériaux et de techniques, le plus souvent situées en dehors des pratiques artistiques habituelles, il cherche à sublimer ces matériaux hétéroclites dans une démarche de fabrication proche de la performance, où l’intuition joue un rôle primordial.
Chaque nouvelle pièce est pour lui l’occasion de fabriquer de l’aventure, par l’expérimentation empirique de techniques inédites ou même une mise en danger physique assumée de lui-même et de la pièce. Ce dépassement de soi, parfois visible, parfois caché dans la couche de peinture qui vient recouvrir une pièce auparavant minutieusement travaillée, est intimement lié au résultat final, c’est-à -dire à l’œuvre achevée, et aussi importante qu’elle, si ce n’est plus.
Ainsi, 5.1, imposant mobile suspendu au centre de l’espace, est-il issu du croisement improbable entre des images de haut-parleurs rectangulaires – évoquant au choix un centre commercial, un stade de foot ou un camp de prisonniers –, de klaxons de camion et de fleurs de liseron, sublimés en une pièce de joaillerie chromée, broche ou boucle d’oreille surdimensionnée. Sur une tige en aluminium lestée de plomb, ouvragée et torsadée comme celle du liseron ou d’un châssis tubulaire de moto custom, se déploient cinq fleurs ; originellement en bois, elles semblent plastifiées par de multiples couches de lasure, dont le dégradé rougeoyant évoque un coucher de soleil, en contraste avec le côté froid et brillant de la tige en métal. L’ensemble apparaît comme un objet à la fois artisanal et high tech, dualité dont son titre, référence à un système de home cinéma, rend compte avec humour. Sorte d’œuvre cinétique, animée d’un mouvement induit par celui du public, son effet hypnotique et « psychotrope » est renforcé par une peinture murale en arrière-plan, qui se réfléchit sur la structure métallique.
Couvrant le mur du fond, comme un paysage abstrait pour les chimères de Wilfrid Almendra, cette fresque emprunte son motif très graphique, dégradé de lignes verticales noires et grises, à une combinaison de motard, et son titre, Superman, à une figure classique et risquée d’acrobatie à moto, qui consiste pour le motard à littéralement voler à côté de sa machine.
À proximité, écho animal à la forme végétale de 5.1, le Flamboyant est un hybride d’hippocampe et de colibri, transposé en un imposant volume de bois à la fois musculeux et sensuel, serti à sa base de fonte d’aluminium et orné d’une crinière de lanières dorées en cuir de chèvre et d’agneau, dont la monumentalité n’est sapée que par une paire d’ailes sous dimensionnées.
En face, les trois œuvres de la série She’s Electric, formes ondulantes en céramique recouvertes de peinture automobile pailletée et se terminant par des cornes en Téflon, rampent sur des tapis de feutre striés d’éclairs, entre saxophones glitter et escargots revisitées par le tuning, à la fois apologie de la vitesse et éloge de la lenteur.
Petite sculpture anthropomorphe en acier galvanisé et fibre de verre à motifs camouflages, Youga, empruntant son titre à celui d’une composition du groupe de musique tribale No Zen Orchestra, clôt cette succession de formes oniriques.
Enfin, dans une deuxième salle, Cuts Across the Land est un portrait de l’artiste sur 360°, un trait dessinant le contour de son profil à chaque degré de la rotation, comme une métaphore de l’exposition et de tout son travail : enchevêtrement a priori abstrait de lignes, le dessin révèle à l’observation son sens, et, dans l’écart entre son principe de base rigoureux et l’inévitable part d’approximation de la réalisation, sa subjectivité.
critique
Cut across the land