Eric DUYCKAERTS — né le 4 février 1953 à Liège (Belgique) ; décédé le 26 janvier 2019.
Eric Duyckaerts est un artiste contemporain belge, dont la pratique englobe performance, conférence, vidéo, installation, écrit… Pratiquant l’art et la philosophie avec un humour distancié, depuis la fin des années 1980 le travail d’Eric Duyckaerts interroge notamment les langages, verbaux et corporels. Au fil de conférences ramassées et étonnantes, Eric Duyckaerts lance des idées, articulant le général de la recherche philosophique actuelle au corps le plus singulier de l’artiste. Avec son allure à mi-chemin entre Buster Keaton et Ludwig Wittgenstein, les conférences d’Eric Duyckaerts oscillent entre expertise et causerie philosophique. Lors de sa performance à la Biennale de Venise de 2007, par exemple, il aura partagé en trois langues, avec son auditoire, les origines du SHRDLU. En 2015, avec Notation, il explicite la question du langage corporel et de ses notations au fil du temps. Tandis que Terpsichore (2015) le filme en train de performer des mouvements de marche.
Eric Duyckaerts : les vecteurs de la subjectivité (théâtre, Fluxus, performance et transmission)
Eric Duyckaerts est licencié en philosophie et en droit (Université de Liège, 1972). En 1984, ses recherches philosophiques portent sur les bascules entre paradoxes et subjectivité. Une recherche qui l’amène notamment, en 1989, à intégrer l’Institut des Hautes Études en Arts Plastiques (Paris). Tout en donnant des cours, de philosophie (École pour Éducateurs, Liège, 1984-1985) puis de sémiologie de l’image et du son (1988-1989), entre autres. Il développe également le séminaire « Communication et paradoxes » (1988-1989) à l’Université Paris VIII. En amont, dès 1980 Eric Duyckaerts fait partie des cofondateurs de Groupov, un collectif d’artistes liégeois. Tourné vers le théâtre, nourri par Fluxus, les Happenings, le Black Mountain College et le Living Theatre de Julian Beck… Groupov explore les potentialités du théâtre (jeu d’acteur, langage corporel…). Eric Duyckaerts en sera l’un des acteurs, de 1980 à 1987.
Langages verbaux et corporels, conférences performées, installations et dispositifs d’énonciation
Dans le domaine de la performance, l’Å“uvre d’Eric Duyckaerts explore notamment le langage corporel de l’expert en sciences humaines. Chacune de ses conférences analyse le dispositif d’énonciation qui enveloppe la parole du sachant. Mais sans jamais tomber dans une caricature désuète, mettant toujours en lumière les infimes ressorts du charisme de l’orateur. Car c’est de cet entre-deux que le travail d’Eric Duyckaerts tire son efficace : orateur charismatique, son jeu d’acteur inclut juste ce qu’il faut de farfelu pour qu’une pointe de doute fasse porter l’attention du spectateur sur le dispositif d’énonciation. Expressions faciales, gestes des mains, hésitations, sourires en milieu de phrase comme pour embrasser l’auditoire dans un mouvement chaleureux et inclusif… La transmission du savoir qualitatif (sciences humaines) implique des dimensions de crédibilité et d’autorité. Expliquer le transfini à ses amis (1983), Main mise, main levée, main morte (1988), Magister (1989)… Le travail d’Eric Duyckaerts scrute notamment ces mécanismes.