ART | EXPO

Cosmogonies charnelles

16 Fév - 20 Mar 2010
Vernissage le 18 Fév 2010

Les images de Roseline Delacour nous renvoient à la question métaphysique du mystère du vivant, du microscopique et du géant et nous disent que le réel n’est qu’une face transitoire de l’infinie réalité.

Communiqué de presse
Roseline Delacour
Cosmogonies charnelles

Un œil en gros plan, se ferme, puis s’ouvre, s’échappe à droite, à gauche, là-haut, là-bas. On entend des bruits de casse, des bris de glace. Et l’œil a peur et l’œil a mal. Il s’abîme comme un miroir qui se lézarde. C’est dit (2008).

Des mains se frôlent, s’engouffrent dans des peaux, s’enfoncent dans leurs plis, leurs rides, caressent des cicatrices, des sillons, des bouts de sexes aussi. Et les doigts malaxent les chairs et les nerfs, très près, tout près. On entend les battements d’un cœur. Palpitations, secousses. C’est vous (2008).

Des bouches pleines de dents, zoomées jusqu’au flou murmurent des «je t’aime», des «je sais pas», des «je ne peux pas» carnassiers. Erotiques, impudiques. On pénètre à l’intérieur, des lèvres et des sons de gorge, des halètements, des souffles ou des soupirs. Pour voir (2008).

Roseline Delacour filme la peau à la loupe, en profondeur, la peau comme on ne la voit pas, organique, au plus proche de ses vibrations, de sa sève, de ses tensions. Les corps à la coupe, en détail, sculptés par la camera ont la consistance du secret, de l’énigme, interrogent les limites du sensible, de la forme et notre perception du réel.

Comme dans les photographies de l’artiste prises à l’infrarouge, les images glissent dans les dessous de l’épaisseur, dans «l’inframince» cher à Marcel Duchamp qui le désignait comme «la limite extrême des choses, ce seuil fragile et ultime qui sépare la réalité de sa totale disparition, comme cette idée d’une surface infinitésimale relevant de deux mondes à la fois.»

Car l’œuvre de Roseline Delacour est une zone de contact, entre l’infime et l’immense, entre l’art et la science, où la chair contient le monde et le monde contient la chair, où les frontières de la forme et de l’abstraction se traversent, se dépassent, et puis s’embrassent.

«Je cherche le visible dans l’invisible et l’invisible dans le visible» dit-elle. Ici, les galaxies palpitent au cœur des corps, vibrent. Elles sont à l’intérieur. Elles scintillent, elles résonnent.

Dans la peau se confond et se fond l’univers. Quand l’infiniment grand rejoint l’atome… Des fenêtres, des parenthèses, des indiscrétions s’ouvrent et l’artiste s’immisce dans les interstices de la représentation pour extraire dans un arrêt sur image: l’insaisissable.

Il y a ce sentiment contradictoire, cette impression d’être confronté à la proximité et à la distance absolue, d’être à la fois en dedans et en dehors. Du monde et du corps. Roseline décalque l’invisible, crée des cosmogonies intimes, en état de bascule, en apesanteur. Parfois, on ne sait plus. Rien. Si l’on est face à un morceau de chair ou à un cratère de planète, si l’on entend des bruits de l’espace ou des rumeurs humaines, si l’on regarde des synapses qui s’électrisent dans un crâne ou une pluie d’étoiles dans l’univers. Parfois, on voit. Presque tout : des moments volés, de tendresse, de caresse, d’amour. Comme un petit retour furtif à la forme.

Les images de Roseline Delacour nous renvoient à la question métaphysique du mystère du vivant, du microscopique et du géant et nous disent que le réel n’est qu’une face transitoire de l’infinie réalité.

Vernissage
Jeudi 18 février 2010. 18h-21h.

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