Aki Kuroda
Cosmogarden New York City
La Maison européenne de la photographie présente, du 23 juin au 29 août 2010, une part moins connue, mais non moins importante, de l’activité extrêmement diversifiée d’Aki Kuroda, son travail photographique associé ici à une nouvelle série de dessins.
Enfant, le jeune Japonais Aki Kuroda fit son apprentissage visuel à partir de la célèbre revue des années trente Le Minotaure, puis connut un véritable choc esthétique avec la découverte de Picasso et de Dali.
Supportant mal le poids de l’ancestrale tradition japonaise, il choisit de s’évader de Tokyo, part voyager à travers l’Europe et les États-Unis, puis se fixe à Paris dès 1970, ville d’élection dans laquelle il ne cesse de déambuler, tel le «flâneur» benjaminien, et où il fera des rencontres décisives — la romancière Marguerite Duras, les philosophes Jacques Derrida et Michel Serre (qui ont participé à Noise, une nouvelle revue artistique et culturelle créée en 1985), l’écrivain Pascal Quignard, le chorégraphe Angelin Preljocaj, pour qui il crée les décors et costumes du ballet Parade en 2008, mais aussi des astrophysiciens, des psychanalystes…
Aki Kuroda est un homme des «passages»: entre les cultures, entre l’Orient et l’Occident, entre «le calme épuré de l’univers zen et le fourmillement du graffiti», entre l’âme et le corps, entre les mythes archaïques et le futur à inventer, entre les arts enfin, qu’il s’agisse de dessin, peinture, gravure, sculpture, fresque, photographie, décor, installation, scénographie, etc. Depuis les années 90, il est à l’initiative d’un projet singulier, Cosmogarden, série de «spectacle-performances» qu’il élabore avec des danseurs et des architectes.
Kuroda se veut aussi un penseur et, dans la mesure du possible, un réformateur de la ville: la ville fonctionnaliste occidentale ayant fait l’aveu de son échec, «l’artiste doit créer dans la ville un espace différent, quelque chose de tordu, une jachère, pour que les gens puissent retrouver la dimension humaine», aime-t-il à répéter.
Les photographies de New York présentées à la Mep, complétées par une dizaine de dessins, peuvent être regardées comme un carnet de voyage, un journal visuel intime, qui disent l’énergie vitale de la mégalopole, des flux qui la traversent et l’irriguent, des lumières, des enseignes et des panneaux publicitaires qui dessinent une véritable graphie urbaine et signent l’inépuisable magie de New York.