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Coopérative de la fertilité

12 Mar - 10 Avr 2010
Vernissage le 11 Mar 2010

Olav Westphalen s’est penché sur la «valeur» du sperme. Ce produit «naturel» est devenu un bien culturel, un enjeu financier et moral de premier ordre, mais Westphalen entame moins ici un débat politique qu’une incursion dans les mécanismes de qualification et de valorisation de matières premières.

Olav Westphalen
Coopérative de la fertilité

Michael Jackson et ses trois enfants au teint diaphane, le docteur Antinori et ses expérimentations permettant à des sexagénaires d’enfanter, l’octomère de Los Angeles, les jumeaux nés de pères distincts, jamais la maternité et la procréation médicalement assistée n’auront autant fasciné ni généré de mythologies modernes d’expérimentations parfois extrêmes.

Elles se sont transformées en business et le sperme à partir duquel elles fonctionnent, leur carburant, en une matière précieuse. Un luxe aussi, considérant la baisse vertigineuse de la qualité du sperme dans nos sociétés occidentales considérées pourtant comme avancées. Olav Westphalen s’est penché sur la valeur de ce «bien» et la difficulté juridique et médicale pour obtenir le précieux liquide dans certains pays et notamment la France. Ce produit «naturel» est devenu un bien culturel, un enjeu financier et moral de premier ordre, mais Westphalen entame moins ici un débat politique qu’une incursion dans les mécanismes de qualification et de valorisation de matières premières.

Jouant formellement sur une stratégie entrepreneuriale, Westphalen transforme la Galerie GP & N Vallois en coopérative, une banque de sperme — lieu de dépôt et de retrait —, signalée par un appareillage de communication et une sculpture minimale: un frigidaire et son contenu aussi convoité qu’une rivière de diamant, l’autel d’une relique à l’aura sulfureuse, entre jus sexuel et promesse de bonheur.

Ah! quand la poétique de la maternité flirte avec la réalité médicale, le secret et les tractations financières… Le commerce du sperme est illégal, mais s’il est vendu comme une sculpture, qu’en est-il ? L’exposition recèle aussi des publicités dessinées pour des bijoux et des pierres précieuses comme pour mieux articuler une tension entre les «priorités». Pouvoir, puissance, plaisir solitaire et signe ostentatoire d’influence (soit potency en anglais qui signifie aussi virilité), entre bling-bling, show-off et secret bien gardé d’une conception assistée, FerCo™ se plait à cultiver les antinomies.

De ce projet conceptuel est également née une série de sculptures et dessins qui n’ont pas pour autant fonction d’illustration. Comme souvent chez Westphalen, on croise le fer avec nombre de référents et de maîtres de l’Histoire de l’art. Kleenex emprunte autant à la palette de mouchoirs en papier qu’à l’esthétique minimaliste son absorption du modulaire en un monolithe de bois. Drums est l’hybride monstrueux résultant de l’union d’une fontaine de jouvence priapique et d’un totem commémorant une marée noire, entre ultra abondance et épuisement des ressources fossiles, gaspillage, surconsommation et rareté. Quant à B-Movie avec son innocent landau recouvert d’une substance gluante, il relève d’un mauvais scénario parent éloigné et dégénéré de L’Exorciste, laissant deviner une descendance plutôt effrayante et quasi cannibale.

FerCo™ n’est pas un business mais une coopérative, une structure qui renvoie davantage l’affaire à l’image «santé» de l’agriculture, de l’élevage, de la reproduction et de la procréation (ces trois noms correspondent à la traduction du seul terme anglo-saxon breeding qui signifie aussi savoir-faire !) qu’à une clinique et à la manipulation génétique.

Article sur l’exposition
Nous vous incitons à lire l’article rédigé par Elisa Rigoulet sur cette exposition en cliquant sur le lien ci-dessous.

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