ART | EXPO

Contre-mesure

08 Mar - 26 Avr 2014
Vernissage le 07 Mar 2014

Ce duo d’artistes issus du domaine du design mène une recherche plastique sur les systèmes de signes typographiques et leurs agencements. A travers leurs œuvres, ils tentent de créer un langage visuel original et polysémique, qui interroge le lien entre le signe, son environnement proche et notre position de lecteur.

Simon Renaud & Jérémie Nuel (A is a name)
Contre-mesure

Jéremie Nuel et Simon Renaud ont commencé à travailler ensemble dans le design graphique en 2006. En 2010, ils créent A is a name et installent leur atelier à Paris. Le duo place au centre de leurs projets différentes notions, puisées dans l’histoire de l’écriture, des mathématiques ou de la physique, et mènent une série de recherches plastiques axée principalement autour d’agencements et de systèmes de signes typographiques. Leur processus de création est souvent l’encodage. Ils englobent une série d’information extérieures et d’interprétations personnelles, provenant de diverses sources, afin d’en dégager un langage visuel original et polysémique.

Les deux artistes font souvent œuvre de digression en cours de réflexion, pour explorer et développer quelques pistes théoriques et formelles. En parallèle de leur travail de commande, ils conduisent des projets de recherche divers, collectifs ou individuels. En témoigne Universe Oscillation, une installation appliquant un principe géométrique soumis aux lois physiques d’une galerie d’art, révélant ainsi tout l’intérêt du duo pour une lecture cosmologique de notre environnement proche. C’est également sur ce principe que repose la série Elementary — des typographies expérimentales dont une lettre seule paraît être un symbole ésotérique alors qu’elle s’éclaire à la lumière d’autres signes pour composer alphabets et mots.

Ces va-et-vient nécessaires entre le signe et son environnement soulignent l’importance du rôle de notre position de lecteur, véritable clef des énigmes graphiques proposées par A is a name. En cherchant le bon angle de vue, nous sommes capable de saisir une anamorphose, elle-même clef pour découvrir des espaces insoupçonnés. Jouant de ce mêmes mouvements de va- et-vient entre culture numérique et artisanat manuel, ils nous propose avec l’exposition «Contre-mesure», un étonnant diptyque dont le point de départ est la déconstruction et la reconstruction créative d’un système sémiologique (ensemble de signes et messages). Le titre de l’exposition est un terme militaire, qui se dit d’une action destinée à rendre inefficaces les armements ennemis. Les deux œuvres BSoD et 5xx explorent l’élément de base de l’image digitale, le pixel, et tentent de revenir à son abstraction. Elles invoquent le code Baudot et les cartes perforées, tout en faisant un discret clin d’œil au Quadrangle (Carré noir sur fond blanc), fameuse huile sur toile peinte par Kasimir Malevitch en 1915.

Le duo a dessiné une police de caractère 6 sur cette dichotomie codé/décodé, lisibilité/illisibilité. Elle peut être affichée de deux manières: la première, lettres collées les unes aux autres sans interlettrage ni interlignage, forment une «matière pixellisée»; en rajoutant des espaces entre les lettres, le texte se dévoile, offrant à nos yeux une deuxième lecture. Par un retournement de paradigme, la façade de la galerie est considérée comme un écran d’affichage digital.

Simon Renaud et Jérémie Nuel se saisissent des Rideaux, nouvel espace d’exposition proposé par Néon, pour mettre en question son format même et l’inaccessibilité de fait des espaces intérieurs du centre d’art qu’il recouvre. Ils transposent ainsi cette potentielle contrariété vers une problématique propre à l’affichage numérique: le bogue. Dans un grand nombre de systèmes d’exploitation, un message est affiché en cas de erreur fatale de l’ordinateur pour prévenir l’usagé qu’il est bloqué. Sous Windows, ce message, appelé «Blue Screen of Death» (écran bleu de la mort), se distingue par une couleur de fond monochrome bleue et un texte d’avertissement.

En dialogue avec l’œuvre sur les Rideaux, les artistes ont conçu un multiple pour la Boîte. Située dans le prolongement de la façade principale, l’autre espace d’exposition du centre d’art est une vitrine qui présente une affiche faisant référence aux codes du protocole «http» qui régit les échanges des pages web sur Internet. En cas d’erreur ou d’impossibilité de communiquer avec le serveur, le code renvoyé commence par un 5 (500, 501, 502, etc.). 5xx est tirée à 100 exemplaires, comme autant de messages d’erreur. Il s’agit d’un autre bogue. Ils souhaitent nous laisser un instant sur un malentendu particulièrement improbable pour des spécialistes du design graphique: concevoir des objets coincés dans l’impossibilité de délivrer un message.

AUTRES EVENEMENTS ART