Pascale Rémita
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Dans le cadre des Instantanés présentés dans la salle Mario Toran, le Frac des Pays de la Loire invite Pascale Rémita. Réalisée en partenariat avec le Ring, artothèque de Nantes, l’exposition est déclinée en deux temps, au Frac des Pays de la Loire et au Ring, artothèque de Nantes, où l’artiste présente un autre volet de son travail.
Au sens large, Pascale Rémita travaille sur la perception et le paysage. À la genèse de ses peintures, il y a toujours un référent photographique et informatif, toujours du «déjà -là », du «déjà -pris» par d’autres regards qui se sont emparés du monde. Dans cette sélection d’images trouvées, les clichés sont extraits des médias de masse, et de plus en plus de photographies glanées sur internet.
Partant de cette matière, Pascale Rémita ne cesse de questionner le regard que l’on croit avoir sur le réel. Qu’elle s’attache à des vues aériennes du paysage, des captures d’écrans de vidéo-surveillance de sites militaires, des territoires architecturés ou vierges, Pascale Rémita ouvre des plateformes où s’animent «des objets de vision». Multipliant les potentielles lectures iconographiques, elle met en jeu la question du doute et la densifi e à l’extrême dans sa pratique picturale. Car à la première strate géologique qui fonde sa démarche, ce temps de sélection, de tri, de décantation des images, elle ajoute une nouvelle couche de mystère en retravaillant ses sources photographiques par la peinture. Elle parfait ainsi un feuilletage complexe de stratifications, traductions, conversions.
Dans cette pratique dynamique, les outils esthétiques de Pascale Rémita sont fluctuants: elle travaille parfois par série, mais n’aime pas beaucoup les ensembles fermés. Elle cherche à rendre visible certains liens souterrains en créant des échos, des chocs, des frottements entre ses peintures. Elle met en mouvement leur lecture.
Autre problématique récurrente : celle de l’échelle. Du macro au microscopique, Pascale Rémita s’amuse souvent de l’élasticité de ces deux approches perceptives. «Par la technologie, nous sommes au coeur d’un écart impressionnant et grandissant entre le proche et le lointain. Comment mettre en mouvement notre regard ? Le leurre me fascine: en voulant voir de plus en plus on voit de moins en moins… à moins qu’il faille tout reconsidérer autrement. Je repense à cette étonnante phrase de Max Planck :
«… nous nous trouvons donc dans la situation d’un homme qui ne pourrait considérer un objet qui l’intéresse qu’à travers des verres de lunettes dont il ignorerait absolument les propriétés optiques.»
Plastiquement, ses peintures distillent une tension permanente entre abstraction et figuration, précision et dissolution, expression gestuelle et neutralité photographique, subjectivité et anonymat. Toujours habitées par leur spectre photographique, ses compositions revêtent une forme de douceur matiériste plutôt séductrice. Un plaisir pictural qui n’occulte jamais le fait que l’oeuvre de Pascale Rémita demeure avant tout un combat du regard pour comprendre le monde.