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Collecter/Recycler

20 Mar - 09 Mai 2010
Vernissage le 20 Mar 2010

Les artistes rassemblés ici soumettent aux images d'archive, récupérées dans des marchés aux puces, dans des albums de famille ou des bibliothèques, différents traitements: à travers la catégorisation, le déplacement et le détournement, différentes stratégies se mettent en place pour réactiver ces images photographiques.

Stanislas Amand, John Baldessari, Eric Baudelaire, Pierre Bismuth, Ludovic Burel, documentation céline duval, Mark Geffriaud, Jonathan Monk, Mathieu Pernot
Collecter/Recycler

Usages de l’archive photographique dans la création contemporaine
Le recyclage de l’image photographique comme procédé de création a déjà une longue histoire. Présente dans les collages cubistes et dadaïstes, les travaux des Surréalistes, des Nouveaux réalistes et des artistes du Pop Art, que ce soit pour s’affranchir des pratiques illusionnistes, pour prendre ses distances avec la notion d’auteur, pour dynamiter les hiérarchies de l’art, pour sa dimension testimoniale et historique ou bien encore pour sa dimension poétique et plastique, l’archive photographique est citée, détournée, interprétée, bref prise comme un ready-made, un matériau pour créer une nouvelle oeuvre.

Le terme archives, au féminin pluriel, se définit comme «un ensemble de documents hors d’usage courant» rassemblés, répertoriés et conservés pour servir à l’histoire d’une collectivité ou d’un individu. La collecte de «documents hors d’usage courant» et son recyclage sous une forme inédite semblent présenter une analogie loin d’être anodine entre les modes de production artistique et les modes de production économique.

Ces images «récupérées» parfois dans des lieux désaffectés ou des marchés aux puces, dans des albums de famille ou des bibliothèques, sembleraient attester d’un choix, même utopique, d’une tentative, même vaine, de ne pas ajouter d’images, de ne pas «en rajouter», dans une société où l’image circule à profusion. Pourrait-on y voir une attitude pour qu’apparaissent des images en moins, des images justes ? C’est l’une des interrogations que soulève l’exposition.

Les artistes soumettent alors ces images à différents traitements: à travers la catégorisation, le déplacement et le détournement, différentes stratégies se mettent en place pour réactiver ces images photographiques.

documentation céline duval assemble des photographies puisées dans un registre vernaculaire selon des thèmes précis. Dans 3 temps en 4 mouvements, elle organise l’activité humaine autour du repos, du travail et du divertissement pour chacune des saisons. Les typologies proposées dans l’exposition autour du printemps insistent sur la dimension bucolique. Par la catégorisation, elle révèle ce qui semble singulier — l’événement familial par exemple — comme un processus systématique dans l’usage amateur de la photographie. A travers la typologie et le mode de diffusion sous la forme d’affiches, l’artiste opère un déplacement de la sphère privée à sa diffusion publique.

Dans la série «Le Meilleur des mondes» (2006), Mathieu Pernot s’empare de cartes postales éditées dans les années 1950-1960. Ces vues de la banlieue française montrent de grands ensembles architecturaux considérés à cette époque comme des symboles de modernité et de progrès. Elles étaient initialement réalisées en noir et blanc lors de la prise de vue puis colorisées de façon artificielle en imprimerie. Ces couleurs factices témoignent d’une vision fantasmée de ces lieux. En reproduisant et en agrandissant ces cartes postales, le tirage photographique produit une dystopie et interroge la réussite du modèle.

Du déplacement au détournement, il n’y a qu’un pas ! Il témoigne de la porosité entre réalité et fiction. Dans la série «The Makes», Eric Baudelaire présente des panneaux lumineux qui évoquent les vitrines de cinémas. Il associe des photographies d’acteurs des années 1960 et 1970 trouvées au Japon à des extraits du livre d’Antonioni That Bowling Alley on the Tiber, une compilation de scenarios non réalisés. Ces «noyaux narratifs» qui reflètent des intentions souvent impossibles à filmer testent les limites du cinéma.

L’artiste en efface certains éléments. Dans les vitrines, se juxtaposent l’intention d’un film et des images réelles isolées de leur contexte narratif initial. De ce geste émerge la possibilité d’un film. Eric Baudelaire joue ainsi sur la notion de «re-make» impossible où deux temporalités se superposent: un futur non-réalisé et un passé qui nous échappe.

Autre forme de dispositif, celui proposé par Ludovic Burel. L’artiste a trouvé sa matière brute dans une usine du secteur reprographique, emblème de la reproductibilité à l’ère industrielle. Il détourne ainsi le matériel promotionnel récupéré sur le site. L’iconographie en place dans les années 1970-1980 en ressort. L’installation qu’il propose pour l’exposition se compose de pêle-mêle sur lesquels sont agencés les documents d’archive que l’on retrouve partiellement dans le film Rien n’a été fait, co-réalisé avec Noëlle Pujol, montré dans un même espace. Le montage du film alterne séquences de fiction documentaire et activation d’archives.

Pêle-mêle, affiche et film jouent de la démultiplication des sources, du potentiel reproducteur de la machine et non sans cynisme, de la place de l’humain face à l’histoire industrielle. À travers ces multiples usages de l’archive l’exposition aborde ainsi plusieurs stratégies de recyclage. L’absence de production d’images n’est donc pas source d’épuisement mais au contraire de renouvellement des potentiels créateurs et offre une nouvelle «écologie de l’image».

Vernissage
Samedi 20 mars à partir de 12h30.

Navette aller-retour depuis Paris – départ à 12h de la place de la Bastille
réservation au 01 70 05 49 80

Evénement
Samedi 10 avril. 15h.
Rencontre autour de l’exposition avec Ludovic Burel, Garance Chabert, Aurélien Mole, …

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