Quand Claudia Triozzi — chorégraphe, performeuse et plasticienne — crée une pièce, le mémorable n’est pas loin. Car Claudia Triozzi (Cie Dam-Cespi) est experte dans l’art de marquer les esprits. En 2000, sa performance Dolled Up conjuguait ainsi installation, vidéo et danse. Dans un joyeux atelier aussi absurde que foutraque, alternant gestes répétitifs et vidéos de mises en situation, Claudia Triozzi y taillait un costume au marché du travail. S’essayant à devenir vendeuse en moquettes, fleuriste ou marchande de maroquinerie, elle concluait : « It is not for me! » [Ce n’est pas pour moi]. Un constat martelé à chaque tentative, soulignant ainsi l’évidence : celle de ses compétences d’artiste. Si ce n’est pas cette performance que reprogramme le CN D [Centre National de la Danse] de Pantin, c’est une pièce de la même période, à savoir The Family Tree (2002).
The Family Tree de Claudia Triozzi et Xavier Boussiron : un cabaret punk
The Family Tree est présentée comme une performance inaugurant un nouveau cycle dans le travail de Claudia Triozzi. Un cycle autour de la voix incarnée. Approfondissement plutôt que rupture, The Family Tree explore la voix, comme élément aussi matériel qu’immatériel. Pour un cycle où la chorégraphie se focalise sur le corps parlant et chantant. La pièce The Family Tree (2002) aura ainsi été suivie par Stand (2004) et Opera’s shadows (2005). Pour The Family Tree, c’est avec le plasticien et compositeur Xavier Boussiron que Claudia Triozzi livre un duo performatif oscillant entre cabaret et concert punk-rock. Et près de deux décennies après sa création initiale, elle ressort la panoplie du multiple, pour de nouveau endosser quantité de rôles. Prêtresse, chanteuse pop, actrice de film… Avec Xavier Boussiron à la guitare, Claudia Triozzi module sa voix et ses incarnations. Et ce, à travers des compositions co-écrites avec Xavier Boussiron.
Claudia Triozzi : des performances où la voix tient le corps en mouvement
Que ce soit dans le projet Pour une thèse vivante (2011 – en cours) ou ses pièces antérieures, Claudia Triozzi n’a cessé de cultiver la composante vocale. Chantée ou parlée. À l’instar de Dolled Up, où le slogan « It is not for me! » venait structurer le chaos. Ou encore dans son film Five Years (2000) où postée à une sortie de périphérique, elle y déclamait le nom des modèles de voitures passant à toute vitesse. Mobilisant, là encore, un mélange d’absurdité et de mise en péril. Avec la voix — forte et posée — comme pilier auquel se cramponner. Performance tout aussi empreinte de décalage, The Family Tree convoque une multiplicité de références. Et chacun pourra y voire passer, à toute vitesse et avec effet Doppler, divers échos artistiques. Des Reines Prochaines de Pipilotti Rist, aux Litanies of Satan de Diamanda Galas… Le tout à la sauce (très piquante) Claudia Triozzi.