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Chrystèle Lerisse et Patrick Rimoux

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@12 Jan 2008

Les micro photographies de Chrystèle Lerisse et les installations lumineuses de Patrick Rimoux, dissociées dans le double espace de la galerie Baudoin-Lebon, produisent un écho silencieux. En évoluant sur la ligne sensible de l’image, les deux artistes nous invitent à réinterroger notre perception du visible.

En pénétrant dans la salle réservée aux photographies de Chrystèle Lerisse, le visiteur découvre une multitude de cadres, au format toujours identique (27 x 29 cm), rigoureusement regroupés en séries d’images noir et blanc. A plus de 50 centimètres, rien n’est encore lisible, et il faut s’approcher, jusqu’à atteindre l’intimité de l’oeuvre, pour distinguer ce que révèle la photographie, précieusement incrustée au centre de l’écrin blanc que constitue le cadre.

Chrystèle Lerisse se plaît à jouer du décalage entre le format de la photo, réduit à l’échelle du film, et l’immensité de ce qu’elle donne à voir. Ainsi, une forêt, enfermée dans un rectangle exigu de 5 cm sur 2, se mue, dans la pénombre, en une traînée noire et grise, laissant imaginer l’effleurement d’un pinceau ou la caresse d’un fusain.
Plusieurs séries, tantôt très obscures, tantôt très lumineuses, jouent sur la dichotomie entre un espace homogène, le ciel, et, sous le trait que dessine une ligne d’horizon ténue, le sol, criblé de taches, scories naturelles créant des ombres fantômes.

L’identification visuelle de l’objet photographié (un champ, un toit, des arbres, etc.) est possible, mais elle ne va pas de soi. L’utilisation récurrente du flou pose la question de la représentation du visible, voué à se réincarner, transcendé par le regard en une matière sensible, ou à disparaître. C’est dans l’apparente disparition de l’objet au profit de la forme qu’il se révèle alors, pleinement.

Très différents dans la forme, les travaux de Patrick Rimoux ont pourtant quelque chose à voir avec les photographies de Chrystèle Lerisse, quant à l’utilisation de l’image et la distance de lecture de l’œuvre.

Sous les voûtes du sous-sol, les œuvres du plasticien prennent, dans l’obscurité, l’allure de veilleuses réconfortantes, qui attirent le visiteur comme un papillon de nuit vers la lumière. Là, il découvre des films en 35 mm (négatifs), déroulés à la verticale et plaqués sur une surface transparente en plexiglas, décollée du mur.

En figeant des images vouées au mouvement, puisqu’il s’agit de films (cinéma), Patrick Rimoux nous invite à recomposer une histoire, qui n’obéit plus à la règle des 24 images/seconde. Les cinéphiles reconnaîtront peut-être alors Madadayo, de Akira Kurosawa (1993), ou L’Homme qui rétrécit, de Jack Arnold (1957).
L’image réduite et démultipliée sculpte dans la lumière des formes géométriques, et la colorise. L’ensemble, s’apparentant à une mosaïque, vient se projeter sur le mur, écran de pierre, à quelques centimètres duquel est fixée la plaque. Dissimulée derrière l’œuvre matérielle, l’ombre compose un vitrail coloré, purement virtuel, qui donnerait à voir l’essence même de l’image. Au centre de l’espace, des films tendus depuis le plafond, faisceaux noirs, tracent une structure pyramidale inversée, véritable abri de lumière, devenu le symbole d’une image-temps.

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