Stéphane Billot a mené un atelier de peinture hebdomadaire dans un bidonville Rrom de l’agglomération grenobloise. L’atelier, réalisé avec les jeunes du camp, a été l’occasion de peindre sur différents matériaux trouvés sur place : bois, pierres, déchets, etc. L’artiste a proposé de peindre les pierres d’une seule couleur ; le bleu a été choisi.
Cette intervention in situ, ce geste éphémère, met en Å“uvre une réflexion ironique sur le rôle de la peinture et son interaction avec l’environnement. Ainsi, toutes les semaines pendant un mois, le groupe a recommencé à peindre les mêmes pierres avec la même couleur, la pluie et l’humidité effaçant le travail entre deux ateliers. L’action, aussi obstinée qu’absurde, a créé des gisements éphémères de pierres qui interrogent, entre autres, la longévité d’un tel environnement, l’espérance de vie d‘un bidonville.
Sur les différentes photos exposées on voit ces pierres d’un bleu artificiel joncher le sol boueux en plusieurs tas devant des habitations faites de matériaux en tout genre, et en arrière-plan quelques arbres, une montagne. La démarche consistant à « décorer la misère » est saisie dans toute son ampleur, les pierres fraîchement colorées étincelant comme des pierres précieuses en plein milieu des débris.
Si le thème de la furtivité est un fil rouge dans l’oeuvre de Stéphane Billot, ici, plus que du furtif, c’est de l’«invu» dont il s’agit: non pas ce qui est invisible mais ce qui est occulté, mis en marge, pas pris en considération. Cette proposition questionne donc la marge, la périphérie, esthétique, géographique mais surtout humaine.
«C’est bien peint» offre un regard sur l’invu et sur une pratique discrète autant que radicale.