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Call it… Kissed by the Sun… Better still the Revenge of Geography

Un dispositif original nous propose une scénographie constituée de cartons, sur lesquels va se créer, en live, un travail d’illustration graphique. Portant l’étendard d’une France qui s’est battue pour ses droits, l’œuvre d’Eugène Delacroix, La Liberté guidant le peuple se transforme, par la magie d’un logiciel de création graphique, en l’effigie d’une France métissée, dont le porte-parole est un jeune black vêtu d’un sweat à capuche. La collaboration de Robyn Orlin et d’Ibrahim Sissoko les a menés tout deux au cœur de leurs combats ordinaires. Ils rappellent ce fait-divers pathologique, la mort absurde et injustifiée de deux adolescents morts électrocutés dans un générateur EDF pour avoir tenté d’échapper à la police, qui conduisit aux émeutes de Clichy-sous-bois et à l’embrasement des banlieues.

Le danseur, seul sur scène au milieu des cartons vides, lance de nombreuses interpellations à son ami, là-haut en régie, comme il pourrait les lancer à son ami, là-bas, à la fenêtre de son immeuble ; comme il les lance au public afin que chacun de nous se sente enfin concerné. Griffonné sous nos yeux, le tableau de Delacroix porte un message de liberté toujours intact. Il s’agit simplement d’une autre époque et d’un autre pouvoir autoritaire. Le propos résonne fort, il est temps de regarder en face les problématiques liées à l’immigration et l’échec des politiques d’intégration.

Par la suite, Robyn Orlin se joue d’autres clichés fondateurs de l’histoire moderne, nous offrant une version de L’Après-midi d’un faune de Vaslav Nijinski ; revu sous les traits d’une danse hip-hop de haute voltige. Puis, c’est l’univers de Peau d’âne de Jacques Demy qu’elle revisite, à travers la chanson de La Recette du cake d’amour, recette de bonheur qui nous est livrée dans une atmosphère de supermarché. Très vite la supercherie est démasquée pour laisser découvrir une autre réalité, et nous sommes à nouveau face à des cartons vides. La vitrine n’est qu’apparat et hypocrisie, celle d’une France qui, ne sachant faire face à sa diversité, se réfugie dans les derniers bastions de ses propres mystifications. De l’autre coté, c’est la survie, cette survie engage la lutte, et cette lutte exige de lever le poing pour dénoncer les inégalités. Dans cet espace, se révèlent les insoumis, ceux qui ne renonceront pas à une dénonciation nécessaire de cette indécence grotesque.

Un ensemble de démonstration simples, efficaces et concrètes permet de souligner le manque d’acuité de nos états d’esprit contemporains. Robyn Orlin se saisit d’un discours, celui de l’autre, et croise les vocabulaires, celui de la danse hip-hop et le tracé subtil du dessinateur Maxime Rebière, avec un talent qui nous invite à dépasser les antagonismes d’une époque confrontée à son absence d’utopies collectives.

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