ART | CRITIQUE

Burning Car

PSarah Ihler-Meyer
@03 Juil 2009

Agir sur le réel, créer des outils de résistance aux monopoles et des stratégies de «contre-économie», voici les ambitions du collectif danois Superflex. Burning car, vidéo d’une voiture en flammes, est la traduction filmique de l’esprit de ce groupe, rebelle et créateur.

Depuis les années 1990, Superflex développe dans divers pays des moyens pratiques pour faire face aux problèmes rencontrés par les autochtones, mais surtout pour résister aux monopoles économiques.
Avec des modes de productions alternatifs, et en collaboration avec les habitants, ce groupe élabore des solutions «contre-économiques». Par exemple, Superflex a mis au point au Brésil une boisson énergétique, Guarana Power, pour permettre à une coopérative locale de lutter contre les multinationales étrangères. D’autres actions du même ordre ont été menées en Nouvelle Zélande, au Danemark ou encore au Cambodge.

Burning Car s’inscrit en toute logique dans cet esprit contestataire et inventif. Plongée dans le noir, une vieille Mercedes d’un gris métallique s’enflamme brusquement. Sur un fond sonore bruyant, fait de crépitements et d’embrasements, de longs travellings circulaires, entrecoupés de gros plans, suivent la lente décomposition de la voiture.
A peine six minutes suffisent au feu pour se répandre du capot à l’habitacle, des phares aux roues. La peinture se boursouffle, se craquèle puis tombe au sol. Les pneus, qui échappent quelques instants aux flammes, finissent eux aussi par être dévorés. Enfin, ce qui reste de la voiture s’affaisse.

Cette vidéo fait évidemment penser aux troubles ayant agités Paris et Copenhague il y a quelques années, Plus généralement, il s’agit de l’image par excellence de la révolte (des temps modernes). Les insurrections en Occident, les guérillas au Moyen Orient, en extrême Orient, en Afrique ou encore en Amérique latine sont jonchées de véhicules brûlés. Burning Car est à ce titre l’icône de la rébellion.

Mais, la contestation ne se résume pas pour Superflex à la simple destruction. Si une voiture est détruite au cours de cette vidéo, un spectacle des plus séduisants s’offre à nos yeux. Le jaune, le rouge et l’orange des flammes, les embrasements, les boursoufflures et les craquelures sont autant d’objets de délectation. Les travellings et les gros plans intensifient notre plaisir visuel, augmentent notre désir de contempler la longue agonie de la Mercedes.

En d’autres termes, l’anéantissement de la voiture s’accompagne dans Burning Car d’une pyrotechnie suave et attractive. Fidèle à lui-même, Superflex se situe une fois encore du côté de la rébellion créatrice.

Superflex
— Burning car, 2009. Vidéo couleur, 9 mn.

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