L’exposition « Calais. Témoigner de la Jungle » à la galerie de photographies du Centre Pompidou, à Paris, ambitionne d’analyser les différents rôles et statuts de l’image en prenant pour objet la situation des migrants installés dans le camp surnommé la « jungle », situé près de la ville de Calais jusqu’à son démantèlement en octobre 2016. À travers trois approches, celle de l’artiste Bruno Serralongue avec son projet documentaire Calais, celle de l’Agence France-Presse avec les clichés diffusés par les médias et celles des anciens habitants du camp avec leurs témoignages, l’exposition offre une exploration comparative d’une imagerie contemporaine, celle de la migration.
« Calais. Témoigner de la Jungle » : photos de Bruno Serralongue, de l’AFP et des habitants
La série de photographies Calais a été débutée par Bruno Serralongue dès 2006, lorsqu’il décide de suivre l’installation progressive des migrants dans ce qui deviendra la « jungle », après la fermeture du camp de Sangatte en 2002. Réalisés à l’aide d’une chambre photographique, ces images captent l’investissement des lieux et leur métamorphose, les premiers campements provisoires des exilés et divers moments de leur quotidien ainsi que leurs tentatives pour rejoindre l’Angleterre.
Les photographies de Bruno Serralongue s’affirment comme un contrepoint aux images médiatiques en s’inscrivant dans une temporalité plus lente et en adoptant une approche décalée qui consiste à maintenir une certaine distance avec les événements. Elles se rattachent à une tradition visuelle différente, celle du tableau d’histoire.
Une exploration comparative de l’imagerie de la migration
Les images réalisées par les photographes de l’Agence France-Presse correspondent quant à elles à un autre rôle de la photographie. Si la fonction de l’image médiatique semble évidente, elle apparaît tiraillée entre deux intentions : transmettre un maximum d’informations en se focalisant sur les événements plus que sur la vie quotidienne, et se distinguer dans la masse des publications en échappant aux stéréotypes propres au sujet. La section consacrée aux clichés de l’Agence France-Presse est enrichie d’entretiens avec plusieurs de ses acteurs et d’autres personnalités du monde des médias, un historien d’art, une philosophe et des figures du monde associatif.
Enfin, la troisième partie de l’exposition dévoile, à travers des photos et vidéos réalisées par des migrants, photographes amateurs mais aussi artistes et professionnels de l’image, une autre réalité que celle montrée par les médias et une autre lecture des événements. En regard de photographies de Shadi Abdulrahman, Alpha Diagne, Zeeshan Haider, Fadi Idris ou encore Arash Niroomand, est présenté le film Photos retrouvées de Babak Inanlou qui offre une réflexion sur les images de la « jungle ».