Fugue

L’exposition « Fugue » à la galerie Almine Rech, à Paris, présente un nouvel ensemble de peintures et de dessins de Brian Calvin qui développe sa galerie de personnages avec des visages de femmes saisis en gros plans selon un procédé qui n’est pas sans rappeler le cubisme. Après les figures de préadolescentes perdues dans un vaste espace qui peuplaient ses précédentes peintures, l’artiste américain se tourne en effet cette fois vers des femmes adultes, dont il cadre la tête de si près qu’il ne reste aucun hors-champs.

Expo « Fugue » à la galerie Almine Rech : peintures et dessins de Brian Calvin

Ces nouveaux personnages s’inscrivent dans une démarche picturale volontairement répétitive : Brian Calvin s’emploie inlassablement à peindre « des gens », développant lentement leur apparence puis leur univers sans ouvrir celui-ci au monde extérieur ni en tirer de l’inspiration. Il en résulte un style ni tout à fait figuratif ni tout à fait abstrait qui tire ses procédés picturaux de divers moments de l’histoire de l’art : Brian Calvin reconnaît comme modèles John Wesley et William Copley, deux peintres qui se sont nourris de la fin du surréalisme et des débuts du Pop Art, mais l’on décèle également dans sa peinture l’influence de Piero della Francesca, Philip Guston, Henri Matisse, Balthus, Alice Neel et Piet Mondrian.

Calvin, dans les traces de Wesley, Copley, Picabia, Braque

Le traitement particulier des visages et des corps dans les nouvelles peintures de Brian Calvin consiste à niveler premier et arrière-plan, de telle façon que tous les éléments, yeux, nez, ongles se juxtaposent sans perspective et qu’un visage de profil au premier plan se superpose directement à un visage de face situé en arrière-plan. On pense ici au cycle des Transparences de Francis Picabia, aux trucages de Georges Méliès et au cubisme analytique de Pablo Picasso et Georges Braque.

Avec « Fugue », Brian Calvin invite à ralentir le rythme de lecture

L’exposition emprunte son titre au grand triptyque Fugue dont la forme et les dimensions (presque cinq mètres de long), inédites dans l’œuvre de Brian Calvin, servent sa recherche d’un rythme interne à au tableau. Le titre Fugue renvoie à un genre musical qui repose sur le principe de l’imitation et sur un nombre constant de voix, de la même façon que Brian Calvin développe son œuvre par des variations parfois minimes d’un tableau à l’autre et s’appuie sur un nombre constant de personnages. Selon les propres termes de l’artiste, ce tableau permet aussi de « ralentir le rythme de lecture ». C’est ce que permet justement l’ensemble de dessins au pastel qui complète l’exposition, témoignant de cette pratique que Brian Calvin a reprise depuis quelques années.