L’exposition «Botanique du silence» dévoile à la galerie Eva Hober une nouvelle série de tableaux de Damien Cadio, tous inspirés par les fleurs.
Des motifs floraux déclinés sous toutes les formes
Les peintures forment une galerie de motifs floraux déclinés sous les formes les plus diverses. Chardons, marguerites, tulipes, œillets, lys et fleurs des champs ; bouquets frais ou fanés, tiges élégamment disposées dans un vase ou pétales dispersés sur un carré de tissu blanc et souillés d’une épaisse peinture noire. Cette nouvelle série intitulée Botanique du silence se concentre sur cet unique sujet qu’elle explore en profondeur. Ainsi est évacuée toute conceptualisation, tout passage par les mots, pour laisser le champ libre à la peinture, à la matière, à l’image pure.
Les variations infinies du motif floral offrent l’occasion à Damien Cadio de poursuivre son exploration de l’image. La nature physique de la peinture prend ici l’avantage sur le langage. Parce qu’elle est muette, la peinture repose alors entièrement sur la puissance visuelle qu’elle dégage. Seul compte l’impact visuel, l’impression directe laissée sur notre rétine. Ainsi la fleur, motif pictural d’un grand classicisme, acquiert dans ces toiles de Damien Cadio une force émotionnelle rare. Elle ne tire pas cette énergie d’un réalisme exacerbé mais plutôt de l’absolu poétique qui s’en dégage.
La recherche d’un état poétique de la peinture
Les tableaux de Damien Cadio réactivent sous une forme picturale la recherche d’un état poétique du langage effectuée par Mallarmé. Tandis que ce dernier décrivait comment les mots prononcés pouvaient mener à une quintessence, la notion pure, hors du parasitage d’autres idées, la peinture focalise notre perception sur l’image pure. Parce que l’objet représenté est évident – il s’agit de fleurs -, l’image ne renvoie à rien d’autre qu’elle-même et le tableau concentre toute son intensité visuelle. Les Å“uvres proposent l’expérience d’une puissance sensorielle directe.
Les titres des tableaux, par leur longueur, leur caractère énigmatique ou leur emphase, semblent contredire cette volonté de s’affranchir de toute signification cachée. Les œuvres s’intitulent
À la charge des hommes, De la faim, De la société civile, Par ces maigres gestes du présent et en se passant du minéral, Encore presque obscur il n’avait pas de jalousie, Exercice de paix en temps de guerre ou encore Toute la vie sous cutanée. Il faut justement y voir une façon ironique de rejeter une lecture des images par les mots. Les titres sont arbitraires, ils n’entretiennent aucun rapport avec la chose peinte. Il rejoint en même temps la démarche du poète, glanant instinctivement des mots qu’il isole, comme la peinture, dans leur pureté.