Sara Maia
Born to be alive
Volontiers ironique et provocatrice, Sara Maia, jeune artiste lisboate, met en scène dans ses tableaux peints et ses dessins muraux, le grand désordre des passions humaines. «Born to be alive»: né(e) pour être vivant(e), le titre choisi pour sa nouvelle exposition, bien connu pour avoir été celui d’un tube disco international de la fin des années 70, donne le ton. Comme le personnage de la chanson, Maia rejette le faux-semblant, l’idéal de perfection mortifère dont nous abreuvent les images publicitaires, le règne des apparences et du blink-blink qui président à nos sociétés modernes.
Usant dans son oeuvre des ressorts critiques du grotesque et du symbolisme, elle représente le monde comme un théâtre où les rapports d’amour, de domination et de dépendance se jouent entre des êtres déformés, masqués, travestis, voire totalement hybrides et transgenre.
Il s’agit de gratter le vernis social, d’ôter les limites du raisonnable, car dessous demeurent les guerres intimes que se livrent en chacun de nous, la volonté et le désir, le civilisé et le bestial, le bien et le mal. Des guerres dont l’enjeu n’est rien moins que l’accomplissement total de notre individualité. Prendre le risque de soi, le risque d’être «definitely alive», c’est prendre le risque de se laisser dérouter par ses appétences.
Comme ont pu le faire Jérôme Bosch au XVe siècle, ou Max Beckmann plus récemment, Maia nous place face à ce risque, moins pour en dénoncer les excès que pour en explorer les modalités et offrir au spectateur la possibilité d’une expérience cathartique. Et il n’est pas anodin que l’artiste puise la trame narrative de ses oeuvres dans les contes populaires de son pays et les mythologies antiques, véritables creusets de l’inconscient collectif. Ainsi, dans le tableau intitulé Sorte macaca (espèce de singe!) la bête serait une guenon, la belle un homme de bonne famille, l’amour impossible ou à jamais ridicule, à moins que… Les fables ont une morale que les peintures et dessins de Sara Maia ne disent pas.