Maria Thereza Alves
Beyond the Painting / Unrejected Wild Flora
Cette exposition présente une œuvre vidéo Beyond the Painting et une série de nouvelles peintures Unrejected Wild Flora (acrylique sur papier).
«Beyond the Painting (2011) est une vidéo de 24 minutes pour laquelle trente femmes ont réinterprété des postures de nus féminins de la peinture française. L’une après l’autre, elles entrent dans le cadre, installent leur corps, se figent dans la pose pendant presque une minute, puis quittent l’espace scénique pour laisser la place. La mise en scène est sobre. Quelques tissus de velours bleu foncé rehaussent la présence corporelle et charnelle des modèles.
Cette vidéo traverse l’histoire picturale du nu féminin du XVIIe au XIXe siècle et convie à s’interroger sur les représentations successives du corps des femmes et sur la manière dont elles ont contribué à une construction fantasmée de l’Autre. Elle prête, en effet, une attention particulière aux représentations de la femme «indigène» (telle l’odalisque — cette esclave vierge des harems) tout en établissant des liens avec les représentations du nu féminin de manière plus générale.
Beyond the Painting expose le fait que la sexualité, comme les multiples configurations fantasmatiques du désir, est une scène sur laquelle le pouvoir s’incarne, circule et s’exerce de façon précaire, redéfinissant les rapports de force, les territoires de la sexualité, re-signifiant les fantasmes (la sexualité hétéro-raciale offrant une autre version du fantasme domination/soumission) et réinventant les identités comme les identifications.»
Emmanuelle Chérel, directrice du projet de recherche Pensées archipéliques de l’école des beaux-arts de Nantes
«Unrejected Wild Flora est une nouvelle série de peintures de Maria Thereza Alves, qui rejoint de précédents projets focalisés sur l’amalgame entre nature, histoire et culture tels que Seeds of Change (1999-en cours), Wake (Berlin 2000 et Guangzhou 2008), ou The Return of the Lake (2012).
Récemment, une colonie de plantes sauvages (normalement considérées comme de mauvaises herbes) a grandi dans le jardin dont s’occupe l’artiste sur une terrasse. Certaines étaient particulièrement belles et contrairement aux habitudes, elles n’ont pas été exterminées immédiatement, mais sont restées y vivre. Cependant, de retour d’un voyage, Maria Thereza Alves trouva les plantes déracinées et jetées partout: quelqu’un les avait vues comme une menace pour les autres plantes avec plus de «pedigree» et les avait donc arrachées sans hésitation.
Ce petit incident, bien que d’apparence banale, est réinterprété et transformé dans le cadre de la série Unrejected Wild Flora comme une représentation de l’aliénation progressive de la nature qu’opère la civilisation occidentale. A travers un groupe de peintures et une photographie, l’artiste nous rappelle la réalité de ces mauvaises herbes tout en soulignant leur beauté. Maria Thereza Alves cherche à maintenir aussi bien le plaisir qu’elles procurent que leur vitalité en créant une œuvre qui interpelle notre insatiable anthropocentrisme et reflète cette destinée qui sera partagée ou non.»
Pedro de Llano, critique d’art et commissaire d’exposition, janvier 2014