Voyage au long cours

L’exposition « Voyage au long cours » au Fonds régional d’art contemporain Normandie Caen propose une déambulation parmi une sélection d’œuvres de sa collection : des artistes importants de différentes générations, qui font appel à une grande diversité de médiums (installation, photographie, sculpture, peinture, collage, ouvrage textile, vidéo, performance…), et ont en commun d’engager une réflexion sur notre rapport au monde et aux civilisations, ainsi que sur les contradictions inhérentes à chaque personne entre sa tendance à idéaliser et poétiser les contrées éloignées et leur réalité politique.

Une exposition en forme de voyage au long cours au Frac Normandie Caen

Le parcours se déploie comme un voyage au sens propre comme au sens figuré : les œuvres font écho de façon continue à l’expérience personnelle de chacun en tissant un lien avec l’histoire, les quêtes intimes, la soif de conquête et de découverte de l’individu et leurs conséquences parfois tragiques. L’envie d’ailleurs est exprimée par l’aspect artisanal de certaines œuvres et la façon dont elles télescopent territoires occidentaux, africains, et amérindiens. Ainsi, au début de l’exposition, la pièce intitulée Le mur de pluie du duo Julia Rometti et Victor Costales, fabriquée de façon traditionnelle, avec des feuilles de palmiers séchées et tressées, par des artisans au Mexique, explore le rapport entre culture et nature et la nature ambivalente des choses, entre artefact et œuvre d’art.

« Voyage au long cours » : vidéo d’ORLAN, peintures de J. Hubaut, photos d’A. Messager

Les questions identitaires, territoriales et migratoires sont abordées à travers des figures hybrides qui ponctuent l’exposition : la vidéo Repère(s) Mutant(s) d’ORLAN forme une galerie de portraits de demandeurs d’asile, dans laquelle les drapeaux des pays qu’ils souhaitent quitter et de ceux qu’ils voudraient rejoindre défilent, mêlés, en transparence sur leurs visages. La série Mes trophées d’Annette Messager crée une topographie du corps nu à partir de fragments photographiques sur lesquels l’artiste a dessiné à l’aquarelle ou au fusain, générant une sorte de femme chimère à la dimension féministe.

Les peintures nivelées de Joël Hubaut, la série Don Joël Hubaut de la Mancha, souligne les dangers de l’uniformisation. L’installation Toubabou (caravelle), réalisée en 2009 à Bamako par Philippe Durand renvoie à l’histoire coloniale, tandis que la sculpture Schoon Schip /Tabula Rasa de Sven ’t Jolle, une maquette d’un navire du XVIIe siècle en plâtre et feuilles d’or posée sur un radeau, offre la vision du capitalisme en faillite.