Communiqué de presse
Vincent Beaurin
Basilic
L’aspiration à un ailleurs nourrit l’œuvre de Vincent Beaurin. Des êtres fantasques et fabuleux y évoluent. Issus des règnes mélangés d’une nature indéfinie, il est difficile d’identifier leur genre. Ils empruntent leur nom à des mythes antiques et populaires, et se montrent sans retenue ni pudeur, dans un silence de pierre. Ces créatures sont privées des organes communs de la perception et de la reproduction; leur corps est dépourvu d’orifices. De ces altérations et de la sensualité reptilienne des contours émane une tension érotique. Le visiteur ne circule pas devant des objets inertes, mais parmi des avatars. Nous nous sentons exposés.
Ces figures agissent comme des révélateurs. L’inertie d’une contemporanéité cantonnée dans la réplique ou les limites du commentaire est ici confrontée à l’intime. L’ensemble des matériaux employés, polystyrène, sable, silex, paillettes, constitue une substance pulvérulente en accord avec l’appréhension épidermique que l’artiste a du monde. Ces créatures sombres percent le blanc cru des murs. Elles nous caressent et nous absorbent avec une douceur qui confine à l’oubli. La galerie résonne alors d’une rumeur lointaine, sous les néons d’une laverie automatique. On soupçonne à cet endroit, l’intervention d’un maître de cérémonie espiègle et inventif.
Passé le seuil de la galerie, un personnage s’incline dans notre direction. De sa hauteur, il nous domine. C’est le djinn. À gauche, contre le mur, une créature appelée leucrote est en lévitation. À notre droite, c’est le scytale qui s’abandonne. Son attitude équivoque de jouissance et de douleur n’est pas sans nous rappeler St Sébastien. Derrière le djinn dans la petite salle contiguë, on découvre plusieurs pièces accrochées en sailli sur les murs, dont une qui peut être assimilé à un oiseau blanc, il est nommé alcyon. La plus volumineuse est un bulbe ou un ventre. Les deux suivantes sont incrustées de silex. La dernière est proche d’une pierre brûlée.
Leur nom respectif est myrrhe, malae, miroir,Terobolem. Un pard est juché sur une console au-dessus de l’ouverture qui donne sur la seconde salle de la galerie. À peine entrés, nous sommes comme frappés de cécité. Le volume est radicalement vide. Seule, une surface brillante s’étale au sol, nappe humide ou huileuse. Elle n’a pas de couleur et pourtant elle use de toutes. Si un temps d’adaptation est respecté pour l’apprécier, elle se transforme rapidement en une étendue mouvante. Cette œuvre est appelée fontaine. Certains connaissent peut-être La Fosse Dionne à Tonnerre en Bourgogne. Cette fontaine abriterait un serpent basilic qui foudroierait de son regard quiconque ne détournerait pas la tête à son apparition.