L’exposition « The laws of reversed effort » donne à voir toute la diversité des pratiques artistiques de Barthi Kher à laquelle répond celle des matériaux utilisés. Kher compose tableaux, sculptures, et installations qui envoient à une même question : Que signifie être humain aujourd’hui ?
Corps humains, corps féminins
L’exposition de Kher, qui n’est pas sans rappeler le foisonnement chaotique d’objets et de matériaux de son atelier de Gurgaon, près de Delhi, présente un projet récent – « Six Women » – qui a progressivement pris forme au cours des deux dernières années. Cette sculpture, reprenant le dispositif traditionnel du nu féminin du dix-neuvième siècle, est l’illustration certainement exemplaire de l’intention de l’artiste de nous conduire à percevoir les modifications du corps humain, et notamment féminin.
Mais cette apparence classique – six corps de femmes nus se faisant face – est ici contrebalancée par le choix de prendre la prostituée comme modèle, sujet académique de la période de la Belle Epoque. Mais Kher n’entend pas jouer de l’ambiguïté de la représentation de cette figure féminine ou nous faire respirer l’atmosphère des maisons closes d’alors, mais nous faire percevoir la singularité de ces corps de femmes indiennes dont elle expose les moulages.
Le corps et ses représentations sont donc au centre des préoccupations esthétiques de Kher qui expose ici un moulage facial du visage de sa propre mère. Ainsi Kher revient-elle sur ce véritable thème d’étude qu’est le vieillissement du corps féminin. Elle tente de faire partager l’expérience du corps dans tous ces états et ses évolutions, qu’il soit glorifié, questionné, hybridé, ou même absent.
Les possibilités du bindi
Emblématique du travail de Kher, elle explore les possibilités infinis du bindi, ces pastilles colorées collées entre les sourcils des Indiennes, sur ce qu’elle appelle des vitrines à deux faces, formant de larges surfaces colorées (« The Betrayal of Causes Once Held Dear »). Mais les bindis sont aussi associés à des miroirs ou à une matière comme l’inox pour composer, par exemple, paysages et fleurs séchées.
Thème fondamental dans l’œuvre de Kher, la mythologie indienne et européenne, est approfondie au moyen de l’utilisation des bindis, comme le laisse voir ces surfaces abstraites que sont « Héroïdes V et VII ». Celles-ci font directement référence à ces lettres envoyées par Didon, Phyllis ou Pénélope à leur amant, purs produits de l’imagination du poète Ovide.