Connu pour ses collections de design et de mode, de jouets et de publicité, le musée des Arts décoratifs a semblé être le lieu idéal pour mettre à l’honneur l’iconique poupée Barbie, en l’inscrivant pleinement dans une histoire culturelle et sociale du jouet aux XXe et XXIe siècles. Sept cent Poupées Barbie sont ainsi déployées parmi des œuvres issues des collections du musée (poupées anciennes, robes, etc.), mais aussi au milieu d’œuvres d’artistes contemporains: documents, journaux, photos, vidéos, qui contextualisent les «vies de Barbie».
Puisant également dans les archives inédites de la maison Mattel, l’exposition s’efforce d’offrir deux lectures possibles. Pour les enfants, elle évoque la pure jubilation d’un jouet universellement connu et, pour les adultes, elle replace cette poupée inventée en 1959 dans une perspective historique et sociologique. Au-delà d’être un jouet, Barbie est le reflet d’une culture et de son évolution. Elle évolue en effet dans le confort moderne tout en épousant de nouvelles causes et questionnant les stéréotypes. Haïe parce qu’elle représenterait une femme trop «idéalisée», elle est pourtant autonome et indépendante, adoptant toutes les ambitions de la femme contemporaine.
C’est en regardant sa fille Barbara jouer avec des poupées de papier que Ruth Handler, l’une des fondatrices de Mattel, se met à rêver d’une poupée de mode en trois dimensions, d’une poupée mannequin. Dans leurs jeux, Barbara et ses amies ne sont pas du tout intéressées par les poupées représentant des enfants mais uniquement par celles représentant des femmes. Elles s’imaginent plus dans leur vie future de jeunes femmes que dans celle de mères ou de femmes au foyer. La détermination de Ruth finit par convaincre les équipes de Mattel, alors exclusivement composées d’hommes, de fabriquer une telle poupée.
Inspirée de la poupée publicitaire allemande Lilli, Barbie est lancée, accompagnée d’une mythologie: originaire du Wisconsin, Barbara Millicient Roberts a une famille et des amis clairement identifiés. Son âge reste volontairement flou afin qu’elle puisse incarner aussi bien une adolescente qu’une jeune femme. Elle est tout à la fois lycéenne, étudiante, nurse ou jeune hôtesse de l’air avant d’embrasser plus de cent cinquante métiers, des plus classiques aux plus avant-gardistes. Barbie a été vétérinaire mais aussi paléontologue, informaticienne, pilote de course, professeur, médecin, danseuse étoile ou encore officier de police. La poupée a également été candidate à la présidence à quatre reprises et astronaute dès 1965, avant même que Neil Armstrong ne pose un pied sur la lune.
A ses côtés, son petit ami Ken, apparu en 1961, est tout aussi célèbre. Ses silhouettes, ses coiffures, ses costumes, sont le fruit de quelques secrets de fabrication dont certains sont révélés pour l’occasion à travers maquettes ou témoignages de ceux qui font le succès de Barbie. Un succès qui tient à la capacité de la poupée à suivre l’évolution de son époque pour se renouveler tout en restant la même. Un succès qui imprègne la culture populaire depuis sa création jusqu’à nos jours, mais qui inspire aussi les artistes. Certains, comme Andy Warhol, en ont fait le portrait. Nombreux sont les créateurs qui ont croisé son chemin de passionnée de mode, imaginant pour elle les tenues les plus extravagantes ou élégantes. Quelques-unes des robes de Barbie sont ainsi signées par des couturiers tels que Thierry Mugler, Christian Lacroix, Jean Paul Gaultier, Cacharel ou encore Christian Louboutin.
L’exposition a été l’occasion pour le musée des Arts décoratifs et Mattel de lancer un concours proposé à tous les élèves majeurs de lycées, écoles d’art, écoles d’arts appliqués et universités. Ces derniers devaient imaginer une tenue pour Barbie. Le musée a reçu cent quatre-vingt-dix-neuf projets de la part de vingt-sept écoles et universités différentes. Douze poupées ont été sélectionnées pour faire partie de l’exposition. Le jury du concours était composé d’Olivier Gabet, directeur des musées des Arts décoratifs, Anne Monier, commissaire de l’exposition, Besma Bagdadli de la maison Mattel, Nathalie Crinière et Hélène Lecarpentier, scénographes de l’exposition, et de Monique Mehrez.