Atelier Van Lieshout : Sportopia

— Éditeur : Le Rectangle, Lyon
— Année : 2003
— Format : 21 x 28 cm
— Illustrations : nombreuses, en couleurs et en noir et blanc
— Pages : 64
— Langues : français, anglais
— ISBN : 2-9515553-4-2
— Prix : 15 €

Télé-réalité
par Laurent Godin (p. 3)

Considérant l’un des paradigmes fondateurs de l’art moderne : la capacité a définir tout objet ou image en tant qu’art par le jeu de la nomination et du déplacement, et sa transformation en un postulat : « en art, tout est possible », l’Atelier Van Lieshout s’empare de tous les aspects de la vie quotidienne pour les intégrer à son programme, comme bon lui semble, au gré des nécessités comme des opportunités.

Faisant preuve d’une énergie et d’un goût pour l’action hors du commun, s’appuyant sur une capacité d’observation et d’analyse disséquante et ultra-réaliste de l’activité humaine, des mécanismes du pouvoir ou des phénomènes de manipulation des masses, Joep Van Lieshout, le « père-fondateur » d’AVL, l’inventeur du « solvism » — une logique prônant la recherche de solution pragmatique face à tout problème — met en œuvre son projet de façon impitoyable.
Il utilise et exploite de manière stratégique et contradictoire, l’ensemble des moyens disponibles et des possibilités offertes dans le monde contemporain. Il profite, tout en l’éprouvant rudement et concrètement, de l’espace de « liberté totale » propre à l’art et légitimé par les institutions. Il construit et propose, sur le modèle économique de l’entreprise, une structure de responsabilisation individuelle et collective, libertaire et organisée, autarcique et reliée, n’imposant pas d’ordre moral, ni religieux, sexuel ou d’aucune sorte.

Inviter AVL à installer Sportopia dans le pavillon qu’occupe le Rectangle, Centre d’art de la ville de Lyon — une ancienne salle de bal du XIXe siècle à l’ombre des marronniers de la Place Bellecour — pour le transformer en un complexe d’équipement de loisirs, s’imposait. Comment une modeste structure de diffusion d’art contemporain résisterait-elle à la formidable puissance de l’organisation AVL ? Comment l’affirmation de liberté contenue dans les pratiques d’AVL serait-elle acceptée ? L’inversion du statut et de la fonction de l’œuvre d’art — instrument au service d’un besoin, plutôt qu’objet autonome — pouvait-elle être opérante ?

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions du Rectangle)

L’artiste
Joep Van Lieshout est né en 1963 à Ravenstein, Pays-Bas. Il vit et travaille à Rotterdam depuis 1987. Il a fondé l’atelier Van Lieshout en 1995.

L’auteur
Jennifer Allen, né en 1965 à Toronto, Canada, vit et travaille à Berlin. Écrivain et critique d’art pour Artforum, Parachute, NU : The Nordic Art Review et De Witte Raaf. Maître de conférence au Collège international de Philosophie à Paris, à l’université Humboldt à Berlin, et à la Kunstakademiet à Trondhein, Norvège.