Scoli Acosta, Denise Aubertin, Elisabeth Ballet, Thomas Bayrle, Madeleine Berkhemer, Laurent Chambert, Miguel Egana, Michel François, Giuseppe Gabellone, Lothar Hempel, Michael Kienzer, Anita Molinero, Richard Monnier, Alain Séchas, Jessica Stockholder, Franz West
Assemblages, constructions, montages
La collection du Frac Limousin comporte une part importante consacrée à la sculpture. Cette exposition dans les trois salles de l’Espace d’Art Contemporain de La Rochelle est l’occasion de présenter deux ensembles d’oeuvres assez contradictoires.
D’un côté, des oeuvres construites qui spéculent sur le langage, la répétition, l’éphémère. De l’autre, des collages et des assemblages de matières hétéroclites, qui tentent des synthèses inédites, parfois incongrues, souvent subjectives.
Ces deux options reprennent le double héritage de la sculpture moderne: d’une part le constructivisme et ses avatars les plus récents, minimalisme, etc. D’autre part le dadaïsme, le surréalisme et l’art combinatoire qui souhaitent intégrer et mélanger des fragments de réalité.
Au centre, un espace de dialogue s’instaure sous les auspices de l’image en mouvement. Un programme de films de sculpteurs est diffusé.
Des constructions
Autour d’une vaste sculpture d’Elisabeth Ballet qui faisait partie, à l’origine, d’un ensemble de quatre présenté à la Biennale de Venise en 1989, et qui, telle une clôture, déploie un motif géométrique dans l’espace jusqu’à le rendre physiquement inaccessible, se distribuent d’autres sculptures toutes basées sur la construction.
Que ce soient les sculptures fabriquées à l’échelle et dans l’espace réel par Giuseppe Gabellone et dont ne subsistent que les photographies, l’exploration des lignes internes d’un dé par Richard Monnier, l’empilement en pyramide de triangles de signalisation routière d’un chantier par Miguel Egana, un mètre ruban métallique roulé en boule par Michael Kienzer, ou la structure en rubans de carton tressés par Thomas Bayrle, toutes ces propositions spéculent sur les limites externes et internes de l’espace.
Des assemblages
En matière de sculpture, l’assemblage est une technique qui est apparue au vingtième siècle. L’exposition que William Rubin organisa au MOMA de NY en 1968 «Dada, Surrealism and their Heritage» constitua une somme considérable sur le sujet, depuis les papiers collés cubistes de Braque et Picasso, le Merzbau de Schwitters, jusqu’aux développements pop contemporains de l’époque (Kienholz, Rauschenberg).
L’intégration d’éléments réels à la composition, le recyclage d’images et d’objets sont souvent les signes expressionnistes d’un art de la survie.
Le régime associatif est autant celui de l’enchaînement des images et des idées, que de l’absurde, de l’incongruïté (tel un parapluie sur une table de dissection), voire de l’iconoclasme (un Rembrandt comme planche à repasser) pour tenter de nous faire approcher la complexité du monde et celle de la relation aux objets qui nous entourent et parfois nous encombrent.
Des films
Dans la salle intermédiaire, des films de sculpteurs sont présentés. Le film de Bayrle montre, étape après étape, son procédé de fabrication. A partir d’un autoportrait de 3/4 en mouvement, simplifié en facettes, l’artiste incruste des images filmées et des sons enregistrés au bord d’une autoroute. Tel un tableau en mouvement de Piranèse ou d’Arcimboldo, il se transforme sous nos yeux en une sorte de divinité autoroutière menaçante.
Dans b(alt), des éléments picturaux se trament qui nous font passer peu à peu de l’image de l’artiste âgé se rasant le matin à celle de son petit-fils nouveau-né sur un lit dans une ambiance sonore crissante et parfois métallique.
Chambert fait une synthèse numérique entre un profil humain et un schéma de moteur qu’il enchevêtre en un mouvement perpétuel.
Séchas reprend à son compte toutes les techniques primitives du film d’animation (ombres portées, silhouettes, ombres chinoises, objets «solarisés» sur une table lumineuse, dessin filmé image par image) et les agrémente de morceaux choisis dans l’histoire de la musique, du baroque au jazz, pour nous immerger dans des Histoires sans parole pleines d’humour.
Enfin, le film Casablanca de Michel François consiste en une série de prises de notes d’idées de sculptures et un journal de vacances familiales au Maroc. Entre naturalisme et gestes essentiels. (Yannick Miloux)