Avec Unisson, le chorégraphe Ashley Chen (Cie Kashyl) propose une pièce chorégraphique pour sept interprètes et un musicien live. S’il est un problème qui hante l’époque contemporaine, c’est probablement celui de la distribution. Des ressources, des revenus, des personnes ou des data dans un espace limité… Avec Unisson, Ashley Chen s’empare de la question en explorant différentes modalités d’organisation. Combinaisons, simplifications, recréations… Dans un monde de quantités finies : le recyclage est aussi une manière de redistribuer les cartes, y compris celles de la danse contemporaine. Mettant en avant une époque de cloisonnements et refus de mixités, Ashley Chen lui oppose la nécessité des hybridations. À contre-courant des mouvements sécessionnistes (Brexit, par exemple) ou de surconsommation, il propose une dynamique de simplification et de convergence, vers l’unisson.
Unisson d’Ashley Chen : la danse comme outil de convergence en acte
Les spectateurs arrivent dans un espace déjà habité, déjà en mouvement. Le sol, jonché d’éléments résiduels (cartons, couvertures thermiques froissées, emballages de nourriture…), compose un espace de récupération. Où dessiner de nouveaux terrains de jeu globalisés. Sur scène, les danseurs explorent individuellement différents types de danses populaires, traditionnelles ou non. Danses disco, inuites, catalanes… Chacun dans sa bulle, le disparate fragmentaire va pourtant donner naissance à des moments de convergence. Appelés à s’intensifier. Au fil de la pièce, les sept interprètes — Magali Caillet-Gajan, Ashley Chen, Konan Dayot, Peggy Grelat Dupont, Mai Ishiwata, Théo Le Bruman, Lucius Roméo-Fromm — opèrent ainsi décompositions, recombinaisons. Le tout étant d’arriver à une forme d’unisson. Avec, en filigrane, la composition sonore live de Pierre Le Bourgeois (Animaux Vivants). Notamment violoncelliste et bassiste, Pierre le Bourgeois a également composé une partie de la musique des Nouvelles Pièces Courtes (2017) de Philippe Decouflé.
Chacun dans sa bulle ou performances synchronisées : fabriquer l’hybridation
En tant que danseur, c’est au sein de la Merce Cunningham Dance Company qu’Ashley Chen aura fait ses armes de 2000 à 2004. Une expérience qu’il prolonge, en tant que chorégraphe, par un sens aigu de l’investissement total. Ainsi qu’une attention accrue à la notion d’ensemble. Tandis que chaque danseur commence par s’isoler sur son propre rythme, les irruptions sonores engendrent des moments de rassemblement. Un danseur qui fait entendre un son de violoncelle… Une voix qui donne soudain l’impulsion d’une synchronisation… L’harmonie se fait alors sous forme de séquences hybrides performées en chÅ“ur. Synthétisant le divers, Unisson met en scène des phénomènes de mimétisme. Un processus compliqué pour une génération de milléniaux pris entre conscience écologique globale et goût pour la distinction individualiste. Une tension qui se retrouve ici sous la forme d’un mouvement sans répit, avec des danseurs déterminés à danser jusqu’à l’épuisement.