Racontez-moi votre première fois à Bâle.
Chantal Crousel. Je participe depuis 1983. Ce n’est que pendant la crise du début des années 1990, pour des raisons budgétaires, que j’ai renoncé à prendre un stand.
Notez-vous des changements entre l’année dernière et cette année?
Chantal Crousel. La fréquentation des collectionneurs a nettement évolué. Les collectionneurs et les amateurs viennent désormais des cinq continents. Le nombre des visiteurs est en augmentation.
C’est le rendez-vous majeur des foires internationales?
Chantal Crousel. C’est à la fois la foire la plus représentative de toutes les tendances actuelles et celle qui affiche la plus grande qualité.
C’est un chiffre d’affaire important pour votre galerie?
Chantal Crousel. Pour la saison il est encore trop tôt pour le dire. L’an passé, Bâle représentait 20% de notre chiffre d’affaire.
C’est l’occasion de vendre des pièces que vous ne pouvez pas vendre ailleurs?
Chantal Crousel. Non. Nous vendons autant de grosses pièces que de petites. Cette semaine nous avons vendu des œuvres de tous nos artistes. C’est une grande satisfaction, car ce phénomène est loin d’être le cas dans notre galerie à Paris. Les collectionneurs de Bâle nous sont fidèles. Ils reviennent tous les ans. Ils demandent à voir les nouvelles pièces des artistes qu’ils suivent au fil des saisons.
Par rapport à Venise, Cassel et Münster, qu’apporte Bâle cette année?
Chantal Crousel. Curieusement, la foire de Bâle offre un choix beaucoup plus grand d’œuvres contemporaines que la Biennale de Venise.
Daniel Templon me disait lui aussi, qu’il était déçu par la Biennale de Venise.
Chantal Crousel. Une foire ne remplace pas une Biennale qui porte la signature de son commissaire. Je me méfie des jugements hâtifs. Le vernissage des Magiciens de la terre, en 1989 à la Villette, en est le parfait exemple. Les critiques et les journalistes avaient massacré l’exposition avant même qu’elle ne commence. Tout le monde était très négatif avant même l’ouverture. A ce moment précis, personne n’aurait misé sur Jean-Hubert Martin, le commissaire de l’exposition. Aujourd’hui ces rumeurs ne pèsent rien devant le succès international remporté par cette exposition historique
Les échos ne sont pas élogieux ici.
Chantal Crousel. Les gens se disent également déçus par la Documenta de Cassel. Ce qui déplaît au public, qui cherchait à satisfaire sa curiosité de nouveaux “produits” internationaux, c’est la mise en valeur de mouvements plus obscurs, qui ont pourtant modelé l’art de l’Europe centrale, de l’Amérique latine surtout dans les années 1960.
Quel est votre sentiment par rapport à cette foire?
Chantal Crousel. C’est une occasion très importante de découvrir de nouveaux artistes. La foire concentre une grande qualité d’œuvres. Elle s’élargit d’année en année. Elle s’ouvre à des galeries de plus en plus jeunes, en conservant ses critères d’exigence.
Êtes-vous fière de certaines de vos œuvres?
Chantal Crousel. Les sculptures exposées de Claire Fontaine, celles de Jennifer Allora et de Guillermo Calzadilla à “Art Unlimited” ont été vendues deux heures après l’ouverture. Ces deux achats, presque instantanés, auraient été impensables à Paris, alors que nous avons consacré une exposition à Guillermo Calzadilla et à Jennifer Allora cette année.
Qu’attendez-vous d’une pièce exposée à “Art Unlimited”?
Chantal Crousel. “Unlimited” permet de présenter des œuvres imposantes et très difficilement montrables sur le stand. C’est un espace complémentaire qui rappelle une salle d’institution.
Des œuvres aussi importantes sont compliquées à produire?
Chantal Crousel. Le coût des pièces n’est pas un frein. Pour “Unlimited” la direction de la Foire de Bâle sélectionne des œuvres de grandes dimensions en veillant à leur qualité et à leur pertinence. Même à coûts de production ou d’installation élevés, elles ont toutes leurs chances de trouver leur place dans une collection. Cette année, les sculptures que nous présentions avaient été exposées en France, elles étaient par conséquence déjà financées. C’est le travail de la galerie de faire en sorte que la rencontre entre le collectionneur et l’œuvre ait lieu.