Avec « Eveil d’essences », l’abbaye Saint-André (Villeneuve-lez-Avignon) propose une exposition estivale tournée vers le bois. Invitant trois artisans en son sein, ce sont trois approches légères et poétiques qui investissent les lieux. Situé dans son écrin végétal, le majestueux et frais Palais Abbatial réunit ainsi des créations d’Alain Mailland, Élisabeth Mézières et Arnaud Mainardi (Atelier Chatersèn). Trio d’artisans cévenoles, chacun d’eux cultive une approche virtuose et singulière du bois. Avec Alain Mailland, les sculptures se font dentelles, pour mieux laisser apparaître des formes végétales. Comme autant de champignons, méduses, fleurs, et coquillages aux allures d’écorce. À la façon de pommes de pin ultrafines, ses créations composent des formes aussi organiques qu’inédites. Pour sa part, Élisabeth Mézières cultive deux pratiques. Avec des objets relatifs aux arts de la table d’une part, et des sculptures de l’autre. Enfin, l’Atelier Chatersèn d’Arnaud Mainardi produit un mobilier léger, en bois souple et ajouré.
Exposition « Éveil d’essences » : Élisabeth Mézières, Alain Mailland et Arnaud Mainardi
Avec Arnaud Mainardi, le meuble en bois se fait léger et ergonomique. Poussant sa compréhension de la matière au paroxysme, Arnaud Mainardi intervient de la forêt au meuble fini. Sylviculteur, feuillardier (travail du châtaignier), vannier, chaisier, cintreur à vapeur… Aucune étape n’est laissée sans rapport aux autres. Travaillant le châtaignier brut, Arnaud Mainardi prolonge des savoir-faire ancestraux en leur adjoignant ses propres découvertes. Au nombre de ses innovations : la collaboration avec des designers contemporains. Le fauteuil Bohème, par exemple, a été conçu avec le designer Jules Marri. Pour un fauteuil en bois seul, conjuguant armatures arrondies en branches brutes (avec écorce sombre) et claires lamelles souples. Une ingéniosité qui lui a valu d’être finaliste du prix pour l’intelligence de la Main de la Fondation Bettencourt Schüller en 2013. Associations créatrices, l’Atelier Chatersèn a également travaillé avec le jeune designer diplômé de l’Ensci Ulysse Bouët (tabouret Myriapode, 2016).
Le bois dans toute sa légèreté à l’abbaye Saint-André : entre design, art et artisanat
Avec Élisabeth Mézières, le bois s’affine jusqu’à l’épiderme. Côté arts de la table, Élisabeth Mézières crée des pièces (bols, gobelets, couverts, saladiers…) dont la finesse séduit. Côté sculptures, elle cultive une série-technique toujours plus proche de l’impossible. Rassemblées sous le terme de Transparence, chaque pièce pousse la finesse jusqu’au plus vibrant de la fibre. Tournage sur bois vert, les objets sont si fins que la matière en courtise la transparence. À la lisière du papier de soie ou de la dentelle. En forme de calebasses ou cocons ouverts, chaque création arbore un grain unique. À l’aune d’une blancheur crémeuse qui, dans la lumière, devient translucide. Tournant et creusant lui aussi le bois vert, Alain Mailland donne quant à lui à ses pièces des formes végétales ou marines. Pour mieux ensuite les sculpter en créatures hybrides, animales ou végétales. Autant de pièces extraordinaires, en somme, à découvrir dans l’exposition « Éveil d’essences ».