Après l’affaire du plug anal de McCarthy qui s’est soldée par le retrait de l’œuvre controversée, après le “saccage” d’une série de clichés de Juliette Agnel, « Les Éblouis du jardin Anne-Frank », dans la nuit du 28 octobre, alors qu’elle était exposée sur les grilles de la mairie du IIIe arrondissement, une nouvelle affaire de censure secoue le monde de l’art parisien. Une photo de Diane Ducruet, Mère et fille, s’est vue ainsi retirée de l’exposition une semaine avant l’inauguration sur décision de la galeriste, sans que le directeur de la MEP ne s’y oppose, au prétexte qu’elle pouvait inviter à des interprétations déviantes. Certains auraient pu être tentés, selon eux, d’y voir la représentation d’un inceste ou d’un acte pédophile.
L’artiste, comme la commissaire de l’exposition, Françoise Paviot, encore sous le coup de la nouvelle, ne comprennent pas cette décision qui semble donner raison aux interprétations les plus déplacées et les plus réactionnaires. L’intimité des relations filiales est en effet le sujet de prédilection de l’artiste depuis quinze ans sans que cela ait jamais généré une telle réaction. D’ailleurs, à y regarder de près, exceptés quelques tweets et quelques lettres anonymes de militants conservateurs, la photographie n’avait provoqué aucun remous public notable. L’artiste et la commissaire s’étonnent d’autant plus de voir la galeriste céder à une pression quasi nulle.
Si la décision de Catherine Houard lui appartient (elle avait accepté d’accueillir cet événement programmé avant qu’elle ne reprenne récemment la galerie), celle de Jean-Luc Monterosso semble relever du parfait non-sens. A l’initiative du programme «Au cœur de l’intime» dans le cadre du Mois de la photo à Paris, il aurait pu et dû s’élever contre une telle action. Après la publication d’un article sur Rue89 et en réponse à la photographe Marie Docher qui a publié sur son blog une lettre ouverte à son attention, ce dernier s’est expliqué en rappelant que la programmation dans les lieux privés ne relevaient pas de la sa compétence, réaffirmant son soutien inconditionnel à l’œuvre de Diane Ducruet.
Au-delà des éternelles questions quant à savoir qui est réellement victime de ces œuvres (érodent-elles simplement à des imaginaires ou créent-elles de réels dommages psychologiques? Et qui, de l’artiste ou de l’accusateur, a l’esprit le plus mal placé?), il est particulièrement inquiétant de voir des professionnels se prémunir contre tout risque de scandale, ne donnant que plus de poids à l’action de ces détracteurs, comme si l’art contemporain avait renoncé à questionner, parfois en perturbant, les représentations collectives.
Lien vers la lettre ouverte sur le blog de Marie Docher