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Antoni Muntadas

Catherine Francblin. Nous accueillons ce soir l’artiste Antoni Muntadas et pour présenter son travail, je suis accompagnée de Christophe Kihm, collaborateur d’Artpress et Émile Soulier, scénariste, critique et assistant de metteur en scène.
Pouvez-vous nous préciser dans quelles circonstances avez-vous rencontré Antoni Muntadas ?

Christophe Kihm. J’ai découvert le travail d’Antoni Muntadas lorsque je me suis intéressé à l’art contemporain et à la question des médias. Nous avons ensuite été réunis au Fresnoy pour enseigner.

Émile Soulier. J’ai aussi rencontré Antoni Muntadas au Fresnoy où j’ai participé à l’équipe de production du projet Die-stadt. J’ai ensuite réalisé mon mémoire de DEA sur son œuvre et commencé mon travail de critique en publiant mon premier texte dans Artpress à propos d’une de ses expositions.

Afin de situer le travail de Antoni Muntadas je vous rappelle quelques éléments.
Né à Barcelone en 1942, installé à New York depuis de nombreuses années, Antoni Muntadas est un voyageur infatigable. Il a enseigné dans le monde entier, réalisé des workshops dans quantités d’universités.
Sa démarche peut être rattachée au courant post-conceptuel; il produit ses pièces majeures à partir des années 80. Il a été l’un des premiers artistes à s’intéresser de manière critique à la télévision. Il a d’ailleurs produit sur ce sujet des pièces très fortes : The Board Room, consacrée au phénomène du télévangélisme américain. Il s’intéresse aux phénomènes culturels, leurs codes, leurs rites, leurs enjeux cachés. Il a travaillé sur les relations entre espace public et espace privé, sur l’architecture et l’urbanisme en tant qu’entreprise de spectacle au service du pouvoir, sur l’espace et sa relation à la mémoire, en général.

Pionnier de l’utilisation de la vidéo et du multimédia, il recourt à tous les moyens à sa disposition : la vidéo, le texte, la photographie, le son, l’affiche, le livre, l’installation.
La plupart de ses projets exigent plusieurs années de travail, car chacune de ses expositions résulte de nombreuses investigations sur le terrain et d’une lente et abondante collecte de documents.

Ses œuvres sont le fruit de cette somme de temps et de savoirs accumulés. C’est pourquoi nous avons intitulé cet entretien : l’art comme dispositif de connaissances. Celles-ci font référence aux systèmes de valeurs qui régissent les groupes sociaux, comme dans l’œuvre Between the Frames, ou à des stratégies complexes qui fondent les différents pouvoirs.
Antoni Muntadas appartient à une famille d’artistes pour laquelle l’art ne renvoie pas à la pure et simple délectation, mais doit exister comme un champ de réflexions et de questionnements. L’art est pour lui un objet de pensée qui sert à éveiller les consciences : c’est «un dispositif d’alerte» comme le note Émile dans son DEA.

Il dit : «Je réalise une œuvre pour comprendre, parce que je suis curieux de nature». Cette curiosité et la dimension cognitive qu’elle imprime à son œuvre est inséparable d’une vision critique.
Je voudrais ajouter que Antoni Muntadas appartient à une génération d’artistes pour laquelle le statut d’artiste ne se réduit pas à produire pour un marché de purs et simples consommateurs. Le statut d’artiste se rapprocherait peut-être, pour lui, de celui du chercheur. En tout cas, l’art est pour lui un enjeu. L’un de ces enjeux étant de présenter une vision qui résiste à la vision harmonieuse de la culture offerte par la société ; qui permette d’en faire apparaître les contradictions, les points d’achoppements.

Enfin, tout en refusant le spectaculaire, ses œuvres témoignent d’un permanent souci d’efficacité visuelle. Comme il le dit, il «emphatise». Raymond Bellour a parlé à son propos d’une «volupté de la démonstration»: un sens de la pédagogie doublé d’un désir de séduire le spectateur sans le manipuler.
Muntadas expose dans les galeries et musées, notamment à Paris à la galerie Gabrielle Maubrie en janvier 2008, dans les médias, à la télévision, dans les journaux et dans l’espace public. En 2005, il a représenté l’Espagne à la biennale de Venise.

Antoni Muntadas va maintenant présenter une sélection d’œuvres consacrées à l’espace et à la mémoire.
Antoni Muntadas. Afin de vous présenter mon travail, je vais m’appuyer sur une certaine terminologie et un vocabulaire qui sont importants pour construire le discours autour du travail. Projet, contexte, recherche, archive, média, espace, lieu site, questionnement, ville, dispositif, intervention, mémoire, artefacts, sont des mots qui composent le vocabulaire de mon travail.

Yesterday Today Tomorrow
est une œuvre qui révèle l’une des caractéristiques de mon travail, c’est-à-dire qu’il prend souvent la forme d’un «work in progress».
Elle a été réalisée au PS1 de New-York en 1976. A l’époque c’était une école publique. Quelques artistes et curators ont été invités à réfléchir et déterminer l’intérêt d’utiliser ce lieu comme un espace d’art alternatif. J’ai photographié ce lieu qui m’apparaissait comme un espace figé, comme celui du dernier jour d’école. J’ai conservé mes images et deux ans après, l’espace avait déjà changé.
J’ai reproduit le même travail 20 ans après, le lieu avait profondément changé et j’ai projeté ces photographies sur des livres blancs. Cette installation qui s’appuie sur la mémoire du lieu, se comprend comme un itinéraire pour découvrir l’espace et montrer la transformation qu’il a subie pour devenir aujourd’hui un véritable centre d’art contemporain. Ce travail pourrait tout à fait se poursuivre mais il ne s’inscrit pas dans la nostalgie, c’est un simple constat. Je n’invente pas, je regarde, je montre, je juxtapose les images.

The Red Room est un travail réalisé aux États-Unis qui a déjà été montré en France, à Rennes. Il est très lié à une période de temps donnée. Cette pièce est hybride. Elle réunit des éléments d’architecture, avec cette salle de conseil, et une série de photos de leaders religieux. Elle représente une métaphore du spectre des différentes religions mêlées à des éléments médiatiques. Finalement cette salle prend la forme d’un conseil d’administration mené par différents représentants religieux, chacun utilisant ses propres medias. Le pape, par exemple qui dirige l’État du Vatican, a non seulement son propre drapeaux, sa monnaie mais aussi sa propre radio, sa télévision, ses journaux, etc. Il en est évidemment de même pour tous les autres leaders religieux représentés dans The Red Room.
Ce travail s’inscrit dans un temps très spécifique où la religion prend une place particulière qu’elle occupe par les médias ou l’économie. Dans chaque portrait, un moniteur est posé sur la bouche du représentant pour présenter son vocabulaire.

Désapparition
est un projet réalisé à Barcelone sur l’espace public. Il s’agit d’une intervention sur le bâtiment même du couvent de Santa Monica. J’ai réalisé une projection qui allait d’une intensité infime à maximum, comme une respiration. Il s’agit d’une métaphore pour dire que l’architecture parle, écoute, que ce lieu a une dimension organique. Il m’intéressait de montrer que ce lieu avait été un couvent, un centre anarchiste, une école de journalisme sous le franquisme et était devenu un centre d’art. L’intervention au sein du lieu suit cette respiration et évoque sa mémoire par la projection de textes, d’images, de sons. Ainsi l’histoire du lieu est contée.

The File Room est un espace architectural qui représente une salle d’archives sur le thème de la censure. La pièce a été présentée dans un contexte particulier : à Chicago, une ville qui concentre beaucoup de musées liés à la mémoire, le musée de la paix est dans une ancienne librairie publique, transformée en centre d’art.

J’ai entrepris des recherches sur le thème de la censure culturelle et réutilisé mes propres archives, notamment un projet sur les médias, mené pour une émission de télévision pendant trois ans en Espagne mais qui n’a jamais été diffusé.
Ce travail commencé en 1994 se poursuit sur le web (http://www.thefileroom.org) et les archives sont complétées par des gens qui ajoutent des éléments. Finalement, ce travail est un prototype qui a généré d’autres travaux. En tant qu’artiste, je suis l’initiateur du projet mais j’en ai abandonné le contrôle. Cet espace sur le web regroupe désormais les archives de 400 cas de censure. L’installation montrée notamment à Buenos Aires en est la représentation physique, une sorte de métaphore de l’espace kafkaïen mais les cas de censures sont enregistrés et triés sur le site internet  par media, type (religion, politiques), emplacement géographique…

Lors de la préparation de cet entretien, Christophe soulignait l’intérêt de la méthode employée par Antoni Muntadas qui consiste à rassembler des documents. Le travail à partir de l’archivage est flagrant dans cette dernière œuvre.
Christophe Kihm. Je reviens tout d’abord sur un aspect important du travail qui est de l’ordre du processus, lequel s’articule avec la notion de dispositif et passe ensuite par des opérations spécifiques. On peut donc parler de méthodologie.

Je tente cette hypothèse : le dispositif propre dont nous venons de parler s’articule avec la dimension politique des pouvoirs et à leur variété, à leur nombre, à leur différence. En abordant ces questions on repense nécessairement aux textes de Foucault et aux termes qu’il utilise.
Il appelle ainsi à une enquête, à une archéologie — terme qui convient parfaitement au travail de Antoni Muntadas — des dispositifs de pouvoir, qu’ils soient dominants ou modestes. En ce sens le dispositif est à l’œuvre. Il est également l’objet d’une enquête.

Alors pourquoi parle-t-on de dispositif? Parce qu’il me semble qu’il s’agit d’une position historique et engagée dans la question de l’activité artistique, non pas dans la production d’objets mais dans des processus de réflexion, de questionnement qui débordent les objets produits. The File Room en est un exemple. Si la pièce physique est une métaphore, le cœur de la pièce est un site internet, qui se déploie vers l’extérieur jusqu’à ce que l’activité du dispositif devienne le site web sur lequel chacun peut déposer et classer un cas de censure. Le processus de la censure étant lui-même ininterrompu, la pièce continue.

Je vais revenir sur deux notions qui m’intéressent particulièrement : l’enquête et l’archive. L’enquête me semble être une condition nécessaire à l’activité d’archive et à l’activité artistique pratiquée par Antoni Muntadas.
Pour enquêter, il y a différentes méthodes. Je ne pense pas qu’il y ait une figure particulière de l’enquêteur chez Antoni Muntadas puisque chacun de ses projets nécessite des moyens propres. Mais chaque projet, en sollicitant une enquête peut devenir une forme d’aventure. Explorer est un terme qu’il utilise.

Pour enquêter, il faut constituer une équipe. Il existe donc des relais avec des personnes, des structures. Il faut collecter des documents attachés à la réalisation du projet, notamment et de façon récurrente dans le travail de Muntadas, sur le site sur lequel se déploie le projet. L’archéologie du lieu, quel qu’il soit, est réalisée, pas de façon exhaustive, mais selon certains enjeux historiques, culturels ou politiques.

Une pratique de la récolte serait donc essentielle dans la formulation d’une proposition artistique. La récolte n’est pas la finalité de la démarche. Il ne s’agit pas d’exposer des documents mais elle est une condition préalable à la réalisation du projet.
Cette recherche d’information est réalisée à l’aide d’outils différents qui vont permettre de réunir des indices, des signes des événements passés qui font resurgir une mémoire du lieu. Il s’agit de rendre visible des éléments qui ne le sont pas ou plus et qui font émerger tout ou partie du lieu d’un point de vue historique, culturel ou politique.

Un des éléments récurrents du travail de Antoni Muntadas consiste donc à faire revenir à la surface la trame d’un lieu sur des plans historique, culturel ou politique, en utilisant une certaine ironie qui se double de quelque chose d’explicatif, de pédagogique, de sorte que l’on doit comprendre quelque chose de ce lieu. Dans ce sens, le travail est donc lié au discours.

Alors comment passe-t-on du document à l’archive, de la récolte à l’archive ?
Tout type de moyen peut être utilisé par rapport au lieu ou à la question soulevée par le projet pour réunir des documents : photographies, objets, journaux, lesquels vont initier la production d’autres documents : stickers, vidéos, livres, dans un style documentaire ou non. Ces extensions participent de la définition du projet comme processus. La proposition présentée dans les expositions n’est finalement, qu’une coupe, un moment, une étape dans le processus de l’œuvre.

Cette coupe dans le processus ininterrompu fait apparaître une production d’objets, de prototypes, sortes de potentiels à réactiver plus tard. Cette notion est très liée au temps, à la durée, c’est pourquoi on parle de « time specific ». Le projet suppose un travail du temps.
La production d’archive consiste à trouver des failles dans l’histoire culturelle, sociale ou politique. Le travail du chercheur, de l’enquêteur est de fabriquer une nouvelle archive et donc d’offrir à l’histoire des dimensions nouvelles.

Antoni Muntadas. Comemorações Urbanas est un projet réalisé en 1988 à São Paulo au Brésil.
A l’occasion de la triennale, j’ai été invité à travailler dans l’espace public. J’ai choisi de travailler avec une architecte Paula Santoro, dans le quartier Novo Este sur les relations entre l’architecture et la ville.
L’œuvre présentait une maquette qui comptait 11 éléments associés à un texte et dans 11 lieux à São Paulo, nous avons disséminé (avec une grande ironie) 11 plaques commémoratives de désastres urbains. Ces plaques ont ainsi révélé la discontinuité du plan d’ensemble de São Paulo qui laisse à l’abandon de nombreux quartiers. Ces plaques sont laissées dans l’espace public pour un temps défini. Il me semble important qu’elles soient enlevées. Je crois qu’on ne doit pas s’imposer dans l’espace public mais seulement exposer.

La mesa de negociation est une table hybride composée elle-même de 12 tables. Les images présentées au dessus représentent différentes parties du monde et montrent les relations politiques et économiques qui se tissent et représentent ainsi la globalisation. Les 12 tables reposent sur des livres liés aux sujets représentés sur les cartes. Il existe deux versions de cette installation.

Le projet développé lors de mon invitation au Fresnoy était de transformer un camion en une structure de cinéma et de relier 3 villes, anciennes capitales européennes de la culture : Lille, Graz et Barcelone. Nous diffusions un film d’interviews d’architectes et de responsables de la gestion politique ou culturelle de ces villes. Le travail s’est concentré autour de l’idée de ville–spectacle. Les grands événements culturels ou sportifs sont en effets des occasions majeure de développement d’une ville. Le film a été projeté à moment précis : après l’événement et de façon plutôt sauvage, dans des lieux publics.

Emile, c’est à cette occasion, en travaillant sur ce projet, en interviewant des gens dans les villes que tu as rencontré le travail de Antoni Muntadas.
Emile Soulier. J’ai effectivement expérimenté son travail de l’intérieur. J’ai été frappé tout de suite par la dimension expérimentale de son travail, une dimension conceptuelle, du point de vue de l’accent mis sur le discours, la recherche et la compréhension du monde actuel. J’ai trouvé très pertinent de diriger l’attention, d’arriver à pointer le curseur au bon moment.
Il isole dans la masse d’information, le mot, le concept précis qui importe à un moment donné. Cette façon de localiser me semble très raffinée et opérante. Elle nécessite le déplacement de l’artiste, du chercheur pour voir de soi-même.

Ce déplacement de part et d’autre de la production est doublé du déplacement du lieu de projection, posté sur un camion, qui va directement en lieu et place de la recherche pour exposer son propos.
Dans le cas de ce film, il s’agissait d’une enquête sur l’architecture et l’urbanisme, sur ce qui apparaissait à Antoni comme le sujet qui importe à ce moment là.

Je pense que ce n’est pas du tout par hasard si il s’est beaucoup intéressé à la télévision à un moment donné, très tôt, dans les années 70. Il a suivi sa quête de l’actualité qui importait dans le monde culturel en allant vers l’internet, vers l’urbanisme qui ont été des sujets importants dans le monde culturel.
Ainsi, à partir des années 80 on a vu le monde culturel se focaliser sur les musées et les centres culturels, autour du lieu, du bâtiment lui-même. Les architectes ont rivalisé d’originalité et d’audace dans leurs projets, au point qu’on pouvait se demander si le monde de l’art ne se résumait pas à une architecture, qui serait ensuite remplie d’objets, mais dont l’attrait fondamental serait le monument.
Voilà, pourquoi il était très judicieux de la part d’Antoni Muntadas de soulever la question de la place de l’architecte dans le monde de l’art : comment l’architecte est devenu un personnage central du monde de l’art contemporain et de la culture.

J’ai donc trouvé très intéressant d’aller rencontrer directement ces architectes.
La dimension expérimentale et critique est récurrente dans le travail de Antoni Muntadas. Le déplacement est aussi une constante que l’on retrouve dans tout son travail : déplacement à travers l’espace géographique et les frontières mais aussi les frontières linguistiques, disciplinaires, les différents médias. Le montage permet ensuite de montrer le jeu des différences entre les cultures et les points de vues.
Souvent le projet n’aboutit pas à l’élaboration d’une thèse, d’un mot d’ordre, ou d’une dénonciation directe mais à la juxtaposition de points de vue face à laquelle on peut réagir de façon très personnelle. On peut utiliser le montage pour fabriquer son propre point de vue ou on peut choisir d’aller plus loin dans la critique.

Chez Muntadas, le déplacement est né dès le début, dans l’Espagne franquiste où son travail a émergé et qu’il a laissée pour aller aux Etats-unis et depuis il s’est déplacé en permanence. Derrière ce besoin de déplacement, il me semble que l’on trouve une forme de quête de liberté, qui serait le fondement de son travail.

Pourquoi toute une série d’œuvres s’intitule On translation…
Antoni Muntadas. Il me semble que cela permet au processus d’interprétation d’opérer, cela apporte différents points de vue et ainsi le projet reste ouvert.

Je vous présente maintenant le projet de Porto Rico pour la station de train de la ville de San Juan, une ville où il y a peu de transport public mais beaucoup de voitures.
Ce projet initie une première idée de transport public. Pour les stations d’arrêt de ce train ils ont demandé à des artistes de produire des interventions permanentes.J’ai négocié que mon installation ne reste que 10 ans et qu’elle occupe les espaces publicitaires par la présentation d’autres images, comme des photographies de Walker Evans sur la ville de San Juan faites en 1946, juxtaposées avec les mêmes vues, prises quarante ans après.

Cela crée une relation plus critique à la ville car cela permet de révéler l’évolution de la ville de San Juan, ses rapports à la consommation, aux transports… J’ai complété ce projet avec la réalisation d’un journal qui regroupait des textes sur l’art permettant de comprendre le travail.
Ce travail n’est pas un hommage mais une façon de prendre conscience des évolutions.

Enfin, pour la biennale de Venise, j’ai été invité à réaliser, en très peu de temps, le pavillon espagnol. Je me suis concentré sur les Giardini qui sont pour moi une perte d’espace public car il  interdit de les utiliser en dehors de cette biennale.
Je me suis intéressé à l’évolution des façades des différents pavillons nationaux. J’ai cherché à transformer le pavillon en un lieu d’information, un lieu d’attente, comme dans les aéroports. J’ai réuni notamment les photos de l’histoire du pavillon, les noms des pays qui ne sont pas.

Quel est le mode spécifique de la critique chez Antoni Muntadas ?
Émile Soulier. Il livre les fruits de ses recherches sur un mode ironique. Nous pouvons isoler deux modalités: le détournement, comme dans son jeu de transformation du pavillon de la biennale de Venise en une sorte de hall d’aéroport et le montage, comme avec les façades des pavillons qui mettent en évidence les esthétiques du pouvoir. Son sens de l’humour peut être caustique et mordant. Il attaque le pouvoir et l’autorité mais jamais de façon frontale, il préfère suggérer. Il a recours au ridicule pour briser l’arrogance.

Christophe Kihm. En effet, la critique ne s’énonce pas sur un mode affirmatif. La forme la plus récurrente employée dans le discours est celle du questionnement.

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