L’exposition « Anticorps » du Palais de Tokyo interroge notre rapport au corps, à autrui et au monde en temps de pandémie, au travers des œuvres récentes ou inédites de 20 artistes, présentées dans un parcours thématique autour de six notions : « Peaux », « Frontières », « Immunité », « Soulèvement » et « Toucher ».
« Anticorps » : des frontières épidermiques et géopolitiques
Les œuvres interrogent la corporalité à travers la notion de frontière : où commence le corps et où finit-il ? Comment délimiter l’intérieur de l’extérieur ? Comment départager ce qui le constitue et ce qui en est étranger ? La réflexion débute ainsi par un examen de la peau comme délimitation du corps. Doit-on la percevoir comme la première barrière face aux éléments ou bien à l’inverse comme une porte d’entrée ? Nos corps semblent en effet moins hermétiques qu’il n’y paraît.
Doit-on seulement considérer l’épiderme comme la limite de nos enveloppes biologiques ? Les artistes Kate Cooper et Tala Madani explorent les extensions technologiques de nos corps à travers des enveloppes virtuelles et des peaux-écrans.
Enfin, en quoi notre conception territoriale et militaire des frontières informe-t-elle notre perception du corps ? En effet, le discours autour du mécanisme de défense biologique fait du corps malade un corps en guerre contre une invasion extérieure.
« Anticorps » : du soulèvement à l’érotisme
Le spectre de la maladie plane dans nos esprits, nous faisant regarder avec méfiance le corps d’autrui comme potentiellement porteur d’un ennemi invisible. Le confinement implique un repli sur soi, à l’échelle du foyer, à l’intérieur de frontières communales, régionales, nationales. La distanciation, quant à elle, frustre un désir de contact social et physique. Enfin, la crise sanitaire révèle d’autant plus cruellement qu’à l’accoutumée les inégalités qui parcourent le corps social et qui rendent certains de ses membres plus vulnérables que d’autres.
A l’heure de ces restrictions, de ces frustrations, de ces injustices, le sentiment de révolte et d’insurrection mène à la création de fictions et de mythes renouvelés chez A.K Burns et Tarek Lakhrissi. L’époque pousse également à inventer de nouveaux espaces et de nouvelles modalités de rapprochement, d’intimité et d’érotisme, comme le montrent les peintures de Xinyi Cheng.