Les murs de la Galerie Loevenbruck sont actuellement tapissés des «Antéclips» de Vincent Labaume. Les magazines, notamment ici d’anciens Play Boy, sont sa matière première. Il y pioche et découpe de multiples figures qu’il assemble afin de composer ses fameux «Antéclips».
Entre collage et photomontage, le donné des magazines se trouve disloqué, coupé, morcelé, puis recomposé pour construire un nouveau discours, un langage imagé inédit.
Le terme «Antéclips» reprend le titre d’une émission que Claude Dominique a animée sur France Inter dans les années 1980, dont Vincent Labaume a relevé les «montages ciselés et les mixages frénétiques pour qualifier un genre de rébus anté-narratif de figures émotionnelles». Rébus qui ne sont pas sans rappeler certains collages dadaistes et surréalistes.
L’oeil circule entre les compositions auxquelles les cadres noirs donnent une unité. Il va à la rencontre de corps sectionnés, s’arrête sur une cuisse, repeinte, maquillée, butte sur la boucle d’une chaussure; puis c’est un regard, un visage qui le retient.
Vincent Labaume tisse une fable anarchique, celle d’un monde où le transformisme social s’est généralisé. Les signes, les visages, les symboles semblent arbitraires ou issus d’une mythologie personnelle. On n’a pas affaire à une construction qui soutiendrait un propos logique, mais à la représentation matérielle d’un discours fragmenté, frénétique. Les règles qui président à l’assemblage des éléments n’ont rien d’aléatoire, mais elles varient avec chaque assemblage. Chacun des «antéclips» se fait ainsi le lieu d’une véritable rencontre entre des éléments hétérogènes et distincts. C’est cette rencontre improbable et poétique qui retient le regard et interpelle le spectateur.
Ces poèmes plastiques ont partie liée avec le discours et le corps, et au-delà avec le discours du corps. En repeignant des fragments choisis de chair, Vincent Labaume voile et recompose le corps de la femme, provoquant le spectateur et l’installant dans une position de voyeur.
Morceler le corps, conduit aussi à interroger les stéréotypes associés au corps féminin, et notamment à la façon dont il est réduit à certaines de ses parties. La multiplication des jambes, des cuisses ou des poitrines toutes aussi séduisantes les unes que les autres finit par devenir monstrueuse. Les corps explosent, à rebours des tentatives actuelles de les maîtriser dans leur vieillissement et leur apparence. Le corps social autant que le corps organique sont mis en pièces.
En outre, les règles du nu féminin qui prévalent dans la peinture sont soumises à une déconstruction radicale. Une série d’«antéclips» intitulée L’Histoire du nu féminin reprend certaines postures classiques et traditionnelles, mais Vincent Labaume en fait dériver les codes du côté de la sensualité et de la sexualité, bousculant ainsi la façon dont la peinture a stigmatisé le corps féminin.
Publications
— Vincent Labaume, Louis Perceau, le Polygraphe, édition Jean Pierre Faur, Paris, 2006.
— Vincent Labaume, Le Grand Secret des provocateurs de longue agonie, Galerie Loevenbruck, Paris, 2001.
Création radiophonique
— Un monde unpeaceful, Arte Radio, 2007.
Â
Vincent Labaume
— L’Histoire du nu, 2007. Série de 19 dessins et collages, formats divers.
— Un ange passe, 2007. Série de 23 dessins et collages, formats divers.
— Le monde de Vénus, 2007. Série de 19 dessins et collages, formats divers.