Anri Sala
Anri Sala
Pour cette nouvelle exposition à la Galerie Chantal Crousel, Anri Sala conçoit et organise un espace où des cycles et des rotations sont orchestrés sur un tempo divisé en trois temps musicaux, dont un silencieux. Ces temps structurés révèlent ce qui devient visible entre les cycles, enrichi et affecté par une expérience précédente. Sur cette base, Anri Sala provoque et étend les qualités de l’improvisation, en définit ses nuances et son potentiel et – tout en intensifiant leurs spécificités – les prépare à l’expérience à venir.
Le cycle commence avec la projection de la vidéo Air Cushioned Ride (2006). Cette oeuvre documente une rencontre dont Anri Sala a fait l’expérience lors d’une traversée de l’Arizona. Il écoute de la musique de chambre baroque dans sa voiture. Alors qu’il s’engage dans une aire de repos, la transmission est perturbée par l’interférence d’une masse de camions garés. De la musique country d’une station non-localisée interrompt la musique baroque par intermittences. Ce type d’interférence s’appelle “cross modulation” ou “spurious emission”.
La deuxième partie du cycle, A Spurious Emission (2007) s’élabore sur cet événement accidentel. Anri Sala a chargé un compositeur de transposer la séquence en une partition musicale formelle, jouée alternativement par un trio baroque (cymbale, viole de gambe, viole) et un groupe de country (guitare électrique, basse et percussions). Ce film met en scène les musiciens et la silhouette fantomatique d’un percussionniste dessinée sur l’image, pendant qu’ils exécutent la partition. Bien que les deux bandes-son soient similaires, c’est l’espace qui compose le son de Air Cushioned Ride, alors que dans A Spurious Emission, c’est le temps qui le déroule. On a la réminiscence de l’espace, mais maintenant, c’est le temps qui le dirige.
After Three Minutes (2007) est une double projection vidéo, qui inclut et re-présente Three Minutes (2004), une vidéo silencieuse dans laquelle une cymbale, filmée sous un éclairage stroboscopique, devient un objet visuel plutôt que sonore. Conscient déjà que, dans cette première version, la technique vidéo standard ne pouvait filmer les émissions stroboscopiques à 90 lumens par seconde, Anri Sala l’a re-filmée lors de sa projection au Irish Museum of Modern Art à Dublin. Il utilisa alors une caméra de sécurité, qui étire les vibrations des battements rythmés en séquences de deux images par seconde. Maintenant, le scintillement dramatique de la cymbale vacille au presque noir dans une pulsion totalement différente de la première vidéo. After Three Minutes projette les deux vidéos côte à côte et synchronisées l’une avec l’autre.
Pendant ce troisième cycle, dans la salle opposée, simultanément à After Three Minutes, les lumières s’allument et une autre oeuvre est exposée. Title Suspended (2008) est une sculpture qui évolue dans le temps. Deux mains gantées pivotent lentement, en vis-à-vis. Ils accomplissent un cycle complet toutes les deux minutes. À chaque tour, l’impression de perfection et de réalité bascule en même temps que les doigts.
En parallèle, dans la salle qui présente la partition, le visiteur peut écouter un LP qui retrace l’improvisation du saxophoniste Jemeel Moondoc, qui répond à sa propre performance dans le film Long Sorrow, durant sa projection à la galerie en 2006. Tout au long de cette exposition, le public est invité à absorber ce qui a été ajouté, créé et fixé à chaque réinterprétation.
Article sur l’exposition
Nous vous incitons à lire l’article rédigé par Frédéric-Charles Baitinger sur cette exposition en cliquant sur le lien ci-dessous.
critique
Anri Sala