Hans Bellmer
Anatomie du désir
Le Centre Pompidou consacre une importante exposition à Hans Bellmer (1902-1975), l’un des artistes majeurs du mouvement surréaliste. Artiste français d’origine allemande, Hans Bellmer a créé l’objet surréaliste par excellence, la Poupée (1934). Avec plus de 250 œuvres (sculptures-objets, photographies, peintures et surtout dessins), cette exposition est centrée sur le concept de l’«anatomie du désir» qui est au coeur de la singulière création de l’artiste. Une œuvre violente et subversive, à l’écriture digne des grands dessinateurs maniéristes.
L’exposition, la première en France à présenter une sélection aussi importante du travail de Bellmer, compte des sculptures-objets, des photographies, des peintures ainsi que des dessins et des carnets inédits. L’ambition majeure de la manifestation est d’explorer ces aspects moins connus de l’œuvre de Bellmer et de permettre au public de découvrir sa richesse.
Explorant le thème de l’«anatomie du désir», concept au cœur de la création de Bellmer, l’exposition rassemble des prêts exceptionnels issus de prestigieuses collections privées ainsi que de grandes institutions comme le MoMA qui prête La Mitrailleuse en état de grâce (1937).
A l’arrivée au pouvoir d’Hitler en 1933, Hans Bellmer a arrêté tout travail socialement utile pour construire une poupée grandeur nature. Si elle constitue au départ un dispositif de rébellion contre toute autorité (politique, paternelle), la provocante Poupée devient l’instrument d’une toute autre ambition et d’une toute autre investigation: une réflexion inédite sur le corps, qui fait de l’objet fétiche de Bellmer la création de référence pour l’expression érotique contemporaine.
Cette créature artificielle aux multiples possibilités anatomiques qui, selon Bellmer, est capable de «rephysiologiser les vertiges de la passion jusqu’à inventer des désirs», va permettre de pousser toujours plus loin l’investigation de l’artiste d’une anatomie de l’inconscient physique.
Cette entreprise ambitieuse traverse l’œuvre de Bellmer: depuis la prise de vue par l’appareil photographique jusqu’à l’expression graphique, qui va du dessin miniaturiste le plus confidentiel à l’épure agrandie quasi abstraite. Sa démarche peut être comprise comme la quête d’une forme vivante permettant de matérialiser l’image du désir et du fantasme.
D’un grand raffinement et pleins d’audace, les dessins de Bellmer retranscrivent les pulsions secrètes, les transferts des sens, les ambivalences du corps érotique. L’artiste montre ainsi les harmonies et la cruelle beauté de la mécanique du désir.
L’exposition souligne la pleine appartenance de Bellmer (qui quitte définitivement Berlin pour Paris en 1938) à la poétique et à l’imaginaire du Surréalisme, et analyse la singularité de cette œuvre violente, éminemment subversive dans le contexte des années 20-30. Incandescente et froide, comme celles de Sade et de Bataille, elle semble en réalité échapper à son temps. Son questionnement des principes d’identité la rend particulièrement proche de notre sensibilité contemporaine.