Stephen Shore
American Surfaces
La galerie kamel mennour est heureuse de présenter pour la deuxième fois, l’œuvre historique de Stephen Shore. Artiste américain célébré depuis les années 60, proche du Pop Art et la Beat Generation d’Allen Ginsberg et de Jack Kerouac, il est une figure majeure pour toute la vague de la photographie naturaliste européenne, de Thomas Struth à Candida Höfer. Pour cette deuxième exposition, Stephen Shore présente American Surfaces, une série d’images prises entre 1972 et 1973, ainsi qu’une série de livres inédits, faits par l’artiste et en tirages limités.
Stephen Shore aime se cogner au réel. À l’âge de 14 ans, il contacte Edward Steichen, alors directeur du département photo du MoMA, et grand photographe de son état, pour lui montrer son jeune travail de photographe. Steichen lui en achète trois. En 1971, alors navigue depuis longtemps dans le sillage de Warhol et de la Factory, il devient le premier photographe vivant à recevoir l’honneur d’une exposition solo au MoMA. A 25 ans, Shore qui ne connaît que Manhattan, s’embarque pour un périple en voiture vers l’Ouest de l’Amérique du Nord. Nous sommes en 1972 et cette quête photographique insatiable à travers la «new frontier» d’une autre Amérique, devient la première étape initiatique d’une longue série de voyages beatniks et autobiographiques. Pendant dix ans, Stephen Shore compile, saisit et pénètre une Amérique sans fard, moins officielle que celle des spotlights new-yorkais, moins clinquante mais plus intime, plus fragile aussi. Chaque lieu, chaque plat mangé, chaque serveur de café, chaque lit où il dort, chaque chambre d’hôtel, chaque personne, chaque carrefour vide… Stephen Shore photographie tout, de manière compulsive, décrivant ce qu’il voit avec exactitude, y intégrant par ricochet des éléments autobiographiques. Un regard naturaliste à la croisée des chemins entre les séries conceptuelles et documentaires du couple allemand, Bernd et Hilla Becher et le regard de Walker Evans
À la manière d’un explorateur, Stephen Shore montre en couleur des fragments du réel, sans artifices et sans ironie, dans une approche très formelle du visible. Sa photographie est à la fois rudimentaire et généreuse: pourquoi ne pas faire d’un lit aux draps souillés, d’un téléviseur ou d’un réfrigérateur une photographie de paysage ? Le réel vu par Stephen Shore n’est pas celui du sublime des grands espaces d’un Ouest hollywoodisé mais celui d’un Ouest humanisé, rendu à ses gens et à ses sensations, aux petits riens à hauteur d’homme, aux détails volés ici et là . Carnet de bord d’un voyageur et de ses errances, dans sa pureté brutale et sa grande simplicité, American Surfaces, bien plus qu’un regard de surface, invite à plonger en profondeur dans la grande histoire des petites histoires, dans le flux de la vie d’un ami américain.
L’exposition à la galerie Kamel Mennour fait écho à l’exposition du Jeu de Paume, «Stephen Shore, The Biographical Landscape, photographies, 1968-1993» (site Sully, du 14 janvier au 20 mars 2005), inscrite dans le cadre d’une grande rétrospective de la Aperture Foundation aux Etats-Unis et en Europe. Stephen Shore est nominé pour le Deutsche Börse Photography Prize 2005.