ART | CRITIQUE

All of the Above

PMoïra Dalant
@05 Déc 2011

Sa «Carte blanche» au Palais de Tokyo place l’artiste suisse John Armleder dans le rôle de créateur autant que dans ceux de scénographe et curateur. Il se fait ainsi metteur en scène de ses contemporains qu’il expose sur une scène comme au théâtre.

Un théâtre d’œuvres, ou théâtre d’images, voilà ce que propose John Armleder dans sa «Carte blanche» au Palais de Tokyo. Sur une scène, et plusieurs paliers, l’artiste présente une accumulation d’œuvres; elles se juxtaposent, se gênent, se cachent les unes aux autres en même temps qu’elles se parlent.
Avec «All of the Above», John Armleder expérimente le processus inversé de celui qu’il a précédemment mis en place au Swiss Institute de New York en 2004. Quand les œuvres placées ensemble à New York étaient présentées à leur taille la plus réduite possible, voire dématérialisées; à Paris l’exposition révèle des œuvres surdimensionnées et omniprésentes, dans une mise en scène d’une fixité presque intimidante.

Utilisant les concepts de la tendance Néo-Géo, le travail de John Armleder repose avant tout sur un principe d’association entre les objets et le décor qui les entoure. Les œuvres se confondent avec l’espace dans lequel elles sont exposées pour ne former qu’une seule entité. Ici, l’auditorium garde donc sa fonction première d’auditorium.

Tous ces artistes placés ensemble sur une scène offrent au visiteur une «super photographie» muette et frontale, en même temps qu’un dialogue imposé par toutes ces œuvres se côtoyant sur une même scène.

Un dialogue en sourdine certes, mais omniprésent. Avec au premier rang le poster de campagne électorale de Bruce Conner comme Supervisor de la ville de San Francisco dans les années 1960 — qui montre un homme peignant le mot «Love» sur le flanc d’un éléphant —, la «cartographie du cerveau de l’artiste» s’annonce sous le sceau de l’humour.
C’est pourquoi dans «All of the Above», un Xavier Veilhan côtoie un Robert Longo, Matthieu Mercier chuchote à l’oreille de Sylvie Fleury, et Bertrand Lavier pactise avec Allan McCollum… dans une mise en scène du super-visible, du trop présent, du rapport de force et de l’organisation chaotique.

Ainsi, en imposant cette scène immobile, John Armleder prend le discours du projet initié par Marc-Olivier Wahl à l’envers — qui conduisait du super-visible au furtif —, en même temps qu’il impose l’immobilité au spectateur.
En effet, le corps n’est pas en mouvement et l’œil ne peut rester fixe, la promenade n’est pas physique mais oculaire, l’œil du visiteur cherche le lien esthétique et poétique de toutes ses œuvres placées face à lui, le narguant de trouver une phrase dans toutes ses strates visuelles.

Å’uvres
Wallace Berman, Troy Brauntuch, Valentin Carron, Delphine Coindet, Guy de Cointet, Bruce Conner, Philippe Decrauzat, Emilie Ding, Sylvie Fleury, Poul Gernes, Fabrice Gygi, Scott King, Stéphane Kropf, Alix Lambert, Bertrand Lavier, Robert Longo, Allan McCollum, Mathieu Mercier, John Miller, Olivier Mosset, Peter Nagy, Steven Parrino, Mai-Thu Perret, Walter Robinson, Gerwald Rockenschaub, Peter Schuyff, Jim Shaw, Laurie Simmons, Michael Smith, Blair Thurman, John Tremblay, Xavier Veilhan

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