ART | EXPO

All Cut Up

14 Avr - 12 Juin 2005
Vernissage le 13 Avr 2005

Candice Breitz perturbe les conventions visuelles en mêlant culture populaire et mass média. Par la réappropriation des images, telles celles des acteurs, elle montre que les plus familières peuvent renfermer des éléments inattendus. Un travail symptomatique d’une génération de la postproduction qui pratique le piratage et le sampling.

Candice Breitz
All Cut Up

«Candice Breitz est l’une des artistes les plus importantes apparues dans les années 90 en Afrique. Après Pascale Marthine Tayou, Kay Hassan, Kendell Geers ou Barthélémy Toguo, le Palais de Tokyo complète avec elle son panorama du continent africain. Son travail, symptomatique d’une génération de la postproduction qui pratique le piratage et le sampling, consiste à réactiver des images aperçues dans la chaîne des médias. De tous les artistes issus de cette mouvance, Candice Breitz est certainement la plus incisive et la plus brutale. Elle met en boucle ou en série, répète ou ralentit ces icônes de consommation courante que sont devenus les acteurs de cinéma ou les stars des soap operas, comme un DJ recréant son propre morceau à partir de samples. « Soliloquy Trilogy » pourrait ainsi être décrit comme ce qui reste d’ un film lorsque tout effet en a été banni. En mettant bout à bout les séquences de « Basic instinct » dans lesquels Sharon Stone émet une parole ou un son, on aboutit à une vidéo de sept minutes seulement : un temps réel, qui vient trouer celui du film. Dans « Diorama », Candice Breitz utilise une série télévisée mondialement connue, « Dallas », comme une langue universelle dans laquelle chacun pourrait puiser ; elle en extrait d’ effrayants soliloques, montrant que les images les plus familières peuvent renfermer des éléments inattendus.»
Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans

Culture populaire et mass média

Candice Breitz perturbe les conventions visuelles en mêlant culture populaire et mass média. Par la réappropriation des images ou du langage, elle élargit son discours personnel à une dimension universelle. Le titre de son exposition, « All Cut Up », est une référence au « cut-up », technique d’écriture inventée par l’écrivain et peintre Brion Gysin dans les années 1950, mais utilisée avant cela de manière expérimentale parle mouvement Dada (en particulier par Tristan Tzara). À l’été 1959, Brion Gysin découpe des articles de journaux et les réarrange afin d’en faire un poème de sa composition, qui donnera à terme le recueil « Minutes to Go ». Cette technique du collage, très utilisée dans les arts plastiques, est à l’origine du travail de Candice Breitz : ses créations passent par un copier-coller vidéo au montage soigneux.

L’artiste offre ainsi une interprétation critique des codes de la culture de masse, qu’il s’agisse de la série télévisée Dallas ou du film Basic Instinct. Pour le Palais de Tokyo, Candice Breitz propose deux œuvres, les installations vidéo Soliloquy Trilogy et Diorama, qui réutilisent les icônes du cinéma et de la télévision. Proches et inaccessibles à la fois, ces stars apparaissent en quasi tête à tête avec le spectateur, par un écran interposé. La dichotomie cinéma/télévision est questionnée dans son rapport à l’espace, puisque les vidéos de « Diorama » sont diffusées sur des écrans de télévision, et celles de « Soliloquy Trilogy » le sont sur l’écran géant d’une véritable salle de projection. Le tout apparaît comme révélateur de notre société de l’image et du son.

Candice Breitz, dont le travail est largement diffusé dans le monde, et dont les œuvres sont présentes dans de nombreuses collections publiques et privées internationales, se considère elle-même comme «un symptôme de notre époque». Elle utilise sa pratique artistique comme moyen de communication : «Je tends à penser que la réalisation d’une installation vidéo est à la fois une traduction et une composition originale», et en définit le résultat comme une «lingua franca» compréhensible par tous et partout. Ses sujets sont les personnages auxquels chacun de nous a accès, chanteurs pop sur MTV, séries télévisées formatées, films hollywoodiens grand public… Cependant, elle en élimine toute narration pour ne garder que l’instant précis qui l’intéresse. Chaque comédien est suspendu à cet instant, une même scène pouvant se répéter en boucle indéfiniment, suivant sans le savoir les directives de ce nouveau metteur en scène qu’est Candice Breitz.

critique

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