Ali Banisadr
Ali Banisadr
«On entend presque le vacarme du champ de bataille. La tournure des événements se fait sentir par la température des couleurs. D’obscurs trafics sont signalés, et l’heure du jugement peut-être évoquée. Dans ces vues plongeantes sur des foules affairées, des récits épiques semblent se dérouler.» – Fereshteh Daftari
La galerie Thaddaeus Ropac présente la première exposition personnelle de l’artiste new-yorkais d’origine iranienne Ali Banisadr, consacrée à ses œuvres récentes.
Dans les souvenirs d’enfance d’Ali Banisadr, marqués par la révolution islamique et par la longue guerre Iran-Irak, les images abstraites se mélangent pour moitié avec les formes reconnaissables. Il en va exactement de même pour ses tableaux récents. Toutes les œuvres de Banisadr produisent une sensation de bruit et de mouvement qui tient à la fois à la densité des images et à la large gamme de couleurs employée pour leur donner vie.
Bien souvent, les tableaux se composent d’ingrédients disparates. Les personnages inspirés des miniatures persanes contrastent avec les grands coups de pinceau qui tirent l’ensemble vers une abstraction grandissante. À y regarder de plus près, on s’aperçoit que Banisadr ne restitue pas seulement la brutalité des événements qu’il a vécus personnellement, mais évoque les forces du mal en général. Sous la pure splendeur des œuvres transparaissent le désespoir, la solitude et la terreur. «Je me suis plongé dans toutes ces histoires de guerre, de complots, de colonialisme, de corruption, de batailles anciennes et modernes, explique Banisadr. L’affrontement et le conflit sont au cœur de mon travail.»
L’influence des maîtres anciens irrigue les œuvres de Banisadr, même si, bien loin de les imiter, il soumet leurs techniques aux exigences de son style éminemment personnel. Elle se fait surtout sentir dans les tableaux qui empruntent leur coloris à la grande tradition de la peinture religieuse occidentale, et semblent baigner dans une lueur presque divine en contradiction avec leur sujet souvent violent. C’est cette originalité du propos et du mode d’expression qui rend les peintures de Banisadr tellement stimulantes.
L’une des œuvres exposées revisite un tableau du peintre hollandais Adriaen Pietersz van de Venne, La Pêche aux âmes (1614), qui illustre le conflit entre catholiques et protestants à l’époque. La version de Banisadr reste dans le registre semi-abstrait, laissant le spectateur libre de déterminer lui-même le contexte et la signification d’une scène dont les personnages n’ont pas de caractéristiques bien définies. «L’artiste plante le décor et fournit les acteurs, mais laisse au spectateur le soin d’identifier les protagonistes», note Fereshteh Daftari.
Publication
L’exposition s’accompagne d’un catalogue amplement illustré, comprenant un texte de Fereshteh Daftari: Les Voix du mal – un ordre mondial commun, dans Ali Banisadr, cat. exp, Paris, Galerie Thaddaeus Ropac, 2010.
critique
Ali Banisadr