« Alep, 1915… » de Rajak Ohanian
Durant l’hiver 2005-2006, Rajak Ohanian s’est rendu par deux fois à Alep, où il a passé plusieurs mois. Il y cherchait les traces de son père Garo (Garabed) Ohanian, qui, déporté, y vécut en 1915, avec son frère Aram, dans un orphelinat – il avait environ onze ans. Le photographe n’a pu retrouver l’endroit, qui n’existe plus aujourd’hui. D’Alep, il a rapporté des images de lieux que son père, enfant, a vus.
Une série de photographies résulte de ce voyage, qui pourrait manifester seulement la qualité de son oeil, d’un noir et blanc rigoureux, précis et profond ou tranchant, comme dans d’autres images auparavant, portraits, paysages – Sainte-Colombe-en-Auxois (1979-1982), Chicago (1987-1989). Il a choisi d’appliquer sur chacune un texte, qui témoigne autrement, avec une autre distance, celle de non-Arméniens, observateurs neutres à l’époque, historiens contemporains, de ce que l’on aura longtemps nommé «la question arménienne» – «génocide» est sans doute, dit-il, la réponse à «la question». Un million, un million et demi de morts, et des dizaines, centaines de milliers de personnes déplacées, spoliées, violentées, réduites à néant ?
Photographies et textes superposés rendent la lecture, c’est volontaire, malaisée. L’ensemble du travail doit être montré comme un bloc, doté d’une présence forte, une puissance, chaque élément solidaire. On peut cependant distinguer une phrase, un lieu. Sachant que ce qui se trouve derrière, c’est la silhouette d’un enfant seul, qu’on n’entend pas et dont ne reste aucune image. De là il est parti, comme tant d’autres, faire sa vie.
Anne Bertrand
Article sur l’exposition
Nous vous incitons à lire l’article rédigé par Anne-Lou Vicente sur cette exposition en cliquant sur le lien ci-dessous.
critique
Alep, 1915…