Présentation
Pierre-Damien Huyghe
A quoi tient le design
«À quoi tient le design», cette phrase est dite d’abord pour affirmer que le design fut une attitude historiquement décidée à l’articulation des XIXe et XXe siècle au sein même de la société industrielle. Mais celles et ceux qui aujourd’hui entreprennent d’inscrire quelque chose de leur personne et de leur existence au nom du design tiennent-ils toujours à cette attitude? Leur paraît-elle seulement plausible? Ce qui procéda certes d’un élan et d’une conviction, mais sut aussi marquer l’époque de quelques faits décisifs (accrochés à la mémoire en tout cas, comme le Bauhaus) est peut-être en train de perdre quelques traits essentiels de son caractère. Peut-être sommes-nous à un tournant, mais peut-être seulement. Faut-il se presser de conclure sur ce point? Rien n’est moins sûr.
En étudiant, par divers biais et de diverses manières les engagements du design historique, ce livre doute qu’une autre époque nous concerne substantiellement. «À quoi tient le design» n’est donc pas exactement — ou pas seulement — une affaire d’histoire. Même sans savoir précisément en quoi, attendant sans doute une philosophie à la fois précise et inquiète quant à ce qui se joue, nous tenons encore à ce à quoi le design a tenu, nous sommes toujours concernés par ses conditions de possibilité. Aux poussées techniques industrielles qui motivèrent autrefois le design se sont substituées des poussées techniques qui n’ont pas la même nature matérielle. Mais ce sont toujours des poussées techniques, et prises comme avant dans une économie. Si le design tient, c’est, ce sera pour qu’elles ne soient pas seulement ainsi prises, mais pour qu’elles parviennent à un mieux naguère appelé «forme» et qu’ainsi parvenues, elles prennent davantage d’allure.
L’ensemble que présentent les éditions De l’incidence sous le titre A quoi tient le design n’est pas hiérarchisé d’avance: les six fascicules qui le composent, chacun doté d’un titre et d’une thématique, ne sont pas numérotés. Chaque lecteur est donc libre de choisir son chemin et sa méthode pour les découvrir. De même à l’intérieur de chacun de ces fascicules, aucun article n’est absolument dépendant dans la place qu’il occupe. La composition linéaire n’est pas abandonnée, mais elle n’est pas imposée.
Pierre-Damien Huyghe est professeur à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Ses recherches portent sur la philosophie et l’esthétique, notamment les conditions d’ouverture des conduites artistiques à la technique et à l’industrie.
Sommaire
(Soit 6 fascicules)
— Poussées techniques / Conduite de découvertes
— Vitrines / signaux / logos
— Travailler pour nous
— Sociétés / services / utilités
— Entretiens
— Le design comme prudence / séminaire