Ida Tursic & Wilfried Mille
6,5
Le musée de Sérignan présente une exposition des artistes Ida Tursic & Wilfried Mille (ou I&W), qui ne forment qu’un lorsqu’il s’agit de peindre. Pour leur première grande exposition dans un musée, le couple d’artistes nous invite à découvrir toute l’étendue de leur talent sous le titre énigmatique «6,5». Cette mesure désigne l’écart moyen entre les deux rétines que notre cerveau utilise pour percevoir le relief. Les artistes présentent des oeuvres récentes basées sur le principe des anaglyphes, images imprimées pour être vues en relief, à l’aide de deux filtres de couleurs différentes (lunettes 3D) disposés devant chacun des yeux de l’observateur.
Avec la série inédite Vintage 3D, Ida Tursic & Wilfried Mille nous proposent des Pin-up aux poitrines généreuses, provocantes sans être vulgaires, empruntées à Harold Lloyd, le grand acteur comique, pionnier de la photographie en 3D ou prélevées sur Internet. Sexy et aguichantes, ces Pin-up prennent vie grâce à cette étonnante technique. Une paire de lunettes 3D customisée par les artistes est offerte au musée pour profiter pleinement de ce procédé appliqué pour la première fois en peinture et en gravure.
Les sources iconographiques et formelles d’Ida Tursic & Wilfried Mille sont multiples. Ils puisent leurs images dans la télévision, le cinéma, les images numériques ou publicitaires, pour créer un lexique déroutant et sans cesse renouvelé. On retrouve des pages arrachées de magazines de mode reproduites à la peinture à l’huile et à une échelle monumentale. Les artistes laissent visibles les traces de leur arrachement et ces pages, extraites de leur contexte, deviennent comme des natures mortes.
Dans l’exposition, des peintures optiques plus anciennes présentent des motifs mouvants et vibratoires. Ces tableaux abstraits, par leurs surfaces illusionnistes, déclenchent des réactions visuelles extraordinaires chez le spectateur. L’illusion de mouvement provoquée par de violents contrastes structurés engendre une perte de repère, jusqu’à faire tourner la tête. D’autres grands tableaux représentent des incendies de maisons sur la célèbre colline d’Hollywood dans une explosion de formes et de couleurs.
Pour chaque peinture réalisée, I&W utilisent des feuilles de papier sur lesquelles ils essaient la couleur et nettoient l’aérographe. Ces pages «test» deviennent à leur tour des impressions jet d’encre de très grand format où tâches, projections et dégoulinures font vibrer la surface. Sur d’autres feuilles, ils inventorient les couleurs utilisées pour former une sorte d’inventaire abstrait des peintures en cours. I&W s’intéressent aux transformations de l’image, à la manière de la transposer d’un médium et d’un contexte donnés dans d’autres et aux traces et effets de ce transfert.
Leur peinture incendiaire met le feu aux codes et classifications. En effet, pas de distinction des genres, abstraction, figuration, op’art, peinture en 3D, aquarelle, huile, gravure, impression, tout passe au rouleau compresseur de la peinture. Au-delà de la grande habileté technique et de la virtuosité picturale, il ne s’agit pas de reproduire mécaniquement des images mais de toujours interroger le visible et sa représentation. Surdoués de la peinture, Ida Tursic & Wilfried Mille jouent de la peinture et elle joue avec eux dans un renouvellement permanent.
Enfin, pour compléter cette exposition, I&W ont souhaité inviter l’artiste suédoise Annika Larsson avec l’oeuvre vidéo « Dog » (2001) et nous conduire dans son univers énigmatique qui met l’accent sur des types de comportements de l’homme dans la culture contemporaine.