Par Mathilde Le Coutour
Á l’origine de cette étude, l’ADC, Association Design Communication, est une organisation qui regroupe depuis 1988 vingt-deux agences de design en France, parmi lesquelles Dragon rouge, Carré Noir ou encore TBWA Consulting. Occupant les premières places sur le marché, ces agences, ou réseaux internationaux d’agences, sont à l’origine de la plupart de nos produits de consommation courante : de l’identité de marque au packaging, en passant par l’architecture commerciale des lieux de vente ou la publicité.
La vision commune des agences est celle d’un design pensé et conçu comme premier media de la marque. Le design est ainsi et avant tout un acteur économique, un outil de conception et d’innovation au sein d’un système global.
Si cette étude vise l’observation de la place des métiers du design en France, elle ne se concentre que sur les agences les plus importantes, sans prendre en compte les petites mais néanmoins nombreuses autres. Toujours est-il que les chiffres-clés de cette étude sont révélateurs d’une évolution, voire d’une re-définition des métiers du design aujourd’hui.
Parmi les principaux communiqués, on retiendra celui du chiffre d’affaires du marché du design. Celui-ci a augmenté depuis la dernière étude de ce type, réalisée en 1991. Il est aujourd’hui de 675 millions d’euros, contre 385 millions d’euros précédemment. Le nombre d’agences a connu une évolution croissante (450 contre 320 en 1991), tandis que l’effectif des salariés n’est qu’en légère hausse (5700 salariés contre 4500 en 1991). La productivité des agences, elle, augmente considérablement.
Un chiffre important nous rappelle que le marché du design est avant tout dominé par la grande consommation (49% du marché), avec l’agro-alimentaire et le luxe devant ceux des services (26%) et de la distribution (12%).
Selon les prestations, l’activité du design est soit intégrée directement au sein de l’entreprise, comme c’est le plus souvent le cas pour le Design Produit, intégré à 70% – on pense à des entreprises comme Decathlon ou Renault -, soit sous-traitée par une agence de design. Les prestations de ces agences relèvent principalement du packaging, de l’identité de marque et de l’architecture commerciale. L’étude met en avant l’explosion récente du Web Design, mais n’évoque pas d’autres secteurs émergents comme celui du design de service, encore peu compétitif au vu des autres secteurs.
On note par ailleurs l’importance de plus en plus grande accordée à l’identité de marque. Celle-ci constitue l’ensemble des signes qui composent la signature de la marque et véhiculent les valeurs de l’entreprise, participant de sa stratégie.
Mais surtout, on observe une orientation de plus en plus poussée vers un design global, qui élargit considérablement le champ d’action du designer, allant jusqu’à la construction et la gestion de l’image des marques. Si cette notion de design global prend aujourd’hui une grande importance, rappelons-en l’un des premiers exemples historiques : celui de la collaboration entre l’architecte Peter Behrens et la firme d’électromécanique AEG en Allemagne, dès 1907. La mission de Peter Behrens s’étendait de la conception de produits à l’image graphique, en passant par les emballages, affiches, en-têtes de papier à lettres… jusqu’à la conception des nouveaux bâtiments. AEG est ainsi la première entreprise à avoir emprunté la voie du design global, corrélatif d’une complémentarité durable entre design et marketing.
Enfin, l’étude révèle la montée du conseil stratégique comme demande de la part des entreprises envers les métiers du design. Ce qui pose finalement la question de l’identité de la profession, qui semble glisser d’un métier de création vers un métier de stratégie, aux champs d’intervention beaucoup plus vastes, aux répercussions aussi bien économiques, politiques que sociales…
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