Carsten Höller, Mike Kelley, Ettore Sottsass, General Idea, Paul McCarthy, Liam Gillick, On Kawara, Philippe Parreno, Pierre Huyghe, Dominique Gonzalez-Foerster
1984-1999. La Décennie
En 1991, le roman de Douglas Coupland Generation X: Tales for an Accelerated Culture dresse le portrait d’une génération de nomades, nés entre 1965 et 1977, «Baby Busts » détachés, adolescents éternisés, qui s’opposent aux «Baby Boomers». Le «X» se réfère à l’anonymat de cette génération, constituée d’individus qui ont pour hymne Smells Like Teen Spirit de Nirvana, et qui ont été marqués par le début d’Internet, la fin de l’histoire et des militantismes, le passage de l’âge de la reproduction à celui de l’accès «illimité».
Cette génération est aussi la première à faire revenir, dans l’art, la mémoire des histoires de pionniers et d’explorations, la désincarnation des toons, l’image des premiers pas sur la Lune, la voix transformée d’Armstrong. Ensemble, ils définissent d’autres rapports au monde, des modes d’expérimentation, de transgression et de détournements qui s’opposent aux (contre-) révolutions précédentes.
Depuis quelques années, cette question générationnelle ne cesse d’être posée à l’échelle internationale. Différentes publications, expositions, débats tentent de cerner ce moment si particulier où se constituèrent des réseaux informels d’artistes, de commissaires indépendants, de galeries, de centres d’art, d’écoles ou de magazines. Des situations qui virent naître les bases d’un vocabulaire de l’exposition, une nouvelle manière de faire de l’art et d’être contemporains.
L’exposition «1984-1999» se saisit de cette décennie qui échappe aux définitions et met en faillite les tentatives historiques. A l’écart des rétrospectives et des compilations décennales, il s’agit d’un espace biographique composé d’objets, de sons, de voix, d’images, de réflexions et de sensations. Conçu par l’artiste Dominique Gonzalez-Foerster, figure majeure de la scène artistique internationale, le paysage de l’exposition apparaît comme la modélisation d’un lieu intermédiaire, entre la ville et la nature, l’intérieur et l’extérieur, le jour et la nuit.
L’exposition ne cherche pas à reconstituer une époque ou à sacraliser un temps idéal et perdu, mais plutôt à actualiser les formes et les procédures qui ont anticipé la création artistique d’aujourd’hui. A partir d’une enquête préalable auprès de quelques figures centrales des années 1990 (l’artiste Liam Gillick, le curator Hans Ulrich Obrist, l’écrivain Michel Houellebecq, le cinéaste David Lynch, etc.), il s’agit de collecter les objets et les sources qui ont traversé et inspiré ces années-là , de créer d’autres agencements non hiérarchisés entre les domaines de l’art, de la littérature, du cinéma, de la musique, de l’architecture et du design.
L’exposition est l’image-miroir de l’esprit des années 1990, que François Cusset définit ainsi: «Un monde où les «jeunes», ceux du moins qui ont atteint l’adolescence au cÅ“ur des années 1980, ont dû réinventer contre un vide critique abyssal les modalités de la désertion et de l’exil intérieur, façonner des contremondes qui le rendissent habitable et des autonomies plus ou moins temporaires — un monde dissous où être triste tient lieu en soi de rapport au monde et fut même, comme le dit l’un d’entre eux, «la seule manière de n’être pas tout a fait Malheureux»».
Commissariat
Stéphanie Moisdon
Scénographie
Dominique Gonzalez-Foerster