A première vue, dans la cohue des visiteurs et avec plus de deux cents lots exposés, ce petit bout de pierre pouvait passer totalement inaperçu. A ceci près que ce n’était pas une erreur encore moins un oubli. Pis, ce petit caillou délicatement posé sur une carte de visite à peine plus grande portait le numéro180 du catalogue sous le titre de Sculpture pour intérieur d’une chaussure ; une œuvre de Uwe Max Jensen, un artiste danois né en 1971, affilié au mouvement néo-fluxus.
L’objet était pour le moins étonnant et l’estimation étrangement basse (10-15 euros).
Samedi 3 décembre, à 17h30, le couperet est tombé et le lot a été adjugé 50 euros (hors frais) sous les sourires parfois crispés de la salle. Cinquante euros, un prix, somme toute raisonnable, mais combien vous diront que c’est déjà une somme pour du gravier !
Le plus étonnant au final, ce n’est pas le prix, c’est qu’en fait rien n’ait changé. Des années après les ready-made de Marcel Duchamp et les excentricités de Jeff Koons, on croyait avoir tout vu ou presque, on croyait même que les visiteurs s’étaient habitués, et avaient pris goût à cette autodérision et cette tendance à l’excès propres à la création contemporaine. Peut-être pas encore. Ou peut-être pas assez car, dès la fin de la vente, dans les couloirs de l’Hôtel, les commentaires allaient bon train.
En revanche, pour les professionnels du marché de l’art, c’est un franc succès. On s’enthousiasme de ce tout nouvel engouement pour les ventes aux enchères. Car avec les ventes d’Art contemporain, le taux de fréquentation des salles ne cesse de croître et les professionnels arrivent enfin à toucher une nouvelle clientèle, plus jeune, qui était auparavant frileuse ou étrangère à l’univers des ventes aux enchères.
Gaëlle Gueidier
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